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Michel Simonis

Juifs et musulmans : unis contre les amalgames
Article mis en ligne le 13 octobre 2024
dernière modification le 28 décembre 2024

Face à la situation au Proche-Orient et à "l’importation" en Belgique des tensions, la mosquée Errahma à Verviers et le Foyer culturel juif de Liège veulent dépasser les préjugés et les instrumentalisations par des politiques et des associations dites représentatives de leurs communautés. Notre espoir de paix n’est pas un slogan politique ou une manœuvre idéologique.

Une carte blanche [1] Publiée dans La Libre le 28-09-2024.

Voici de larges extraits.
Voir le texte complet sur mon blog Larcenciel-Palestine,
Ou sur La Libre du 28/9/2024

Le 20 mai dernier, la mosquée Errahma à Verviers, doyenne de Wallonie, a célébré son cinquantième anniversaire. La cérémonie, placée sous le signe de la fraternité judéo-musulmane, fut l’occasion pour des représentants du Foyer culturel juif de Liège de répondre à l’invitation et d’échanger des témoignages spontanées et sincères de solidarité. Il a été rappelé à cette occasion que, malgré les émotions suscitées par les évènements internationaux, les citoyens de ce pays sont également les gardiens de valeurs et de principes intangibles que nous souhaiterions voir appliqués ici. Ainsi, peu importe notre histoire et notre sensibilité individuelle, que nous reconnaissons certes, il est essentiel que chacun se sente en sécurité et intégré dans notre communauté nationale. La convergence de courage et de générosité exprimée par les représentants, tant de la mosquée que du foyer culturel juif, leur volonté de se réunir, en dépassant les préjugés et les tensions du moment, ont fait de cette célébration un moment d’une rare intensité.

Des instants comme ceux-là sont d’une importance capitale dans les temps que nous traversons, et nous espérons qu’ils ne restent pas isolés dans notre pays.

Nos identités sont instrumentalisées, tantôt pour les dévaloriser, tantôt pour les opposer, parfois en prétendant protéger l’une au détriment de l’autre.

Pourtant, nous sommes, en tant que citoyen (ne) s de cultures juive et musulmane, sans cesse confrontés, avec une intensité inégalée depuis près d’un an, aux amalgames construits par les discours politiques et les associations dites représentatives de nos communautés, qui tendent à nous enfermer dans un piège identitaire. Nos identités sont instrumentalisées, tantôt pour les dévaloriser, tantôt pour les opposer, parfois en prétendant protéger l’une au détriment de l’autre. Nous nous sentons pris en otage, forcés de nous défendre contre une posture qui nous a été imposée, sans que nous ne l’ayons sollicitée ni consentie.

La situation au Proche-Orient est une tragédie qui nous afflige profondément. L’attachement que nous avons pour ces populations et cette terre leur confère une place particulière dans nos cœurs. Notre espoir de paix n’est pas un slogan politique ou une manœuvre idéologique, mais une conviction sincère qu’un avenir pacifique est possible pour cette terre. Aujourd’hui, que ce soit l’extrême droite ou le terrorisme islamiste, ces deux camps, malgré leurs divergences, engendrent sur place tragédies et déstabilisations. Ces deux forces cherchent à créer des amalgames : d’un côté, en associant tous les Palestiniens au terrorisme, et de l’autre, en réduisant tous les Israéliens à un gouvernement extrémiste.

Les visions manichéennes, nourries de préjugés, n’apporteront jamais une société plus juste ou fraternelle.

Dans notre entourage, en Belgique, de nombreux citoyens juifs sont révoltés par le désastre humanitaire infligé aux Palestiniens, et de nombreux citoyens musulmans condamnent les attaques contre des civils Israéliens. Nous sommes conscients que la situation nous impose une responsabilité qui ne doit céder à aucune indignation sélective. Chaque vie humaine, qu’elle soit israélienne ou palestinienne, a une valeur inaliénable. Nous refusons toute hiérarchisation des souffrances et défendons la dignité de chaque être humain.
(…)

La double instrumentalisation du conflit dans le contexte politique belge a déjà été justement dénoncée (C. Van Coevorden, "Israël-Palestina ? Het hele debat is gereduceerd tot een ideologische voetbalwedstrijd", 24 août 2024, Knack.be

(...)
En tant que simples citoyens, nous discernons aussi clairement les mécanismes de manipulation du gouvernement israélien ou du Hamas, que leurs récupérations dans le débat politique belge.

Ceux qui soufflent sur les braises des fractures identitaires, par leur irresponsabilité, divisent la société, et réécrivent une histoire qui est pourtant une part de nous-mêmes.

Celle, par exemple, de la coexistence plus que millénaire entre juifs et musulmans dans les pays arabes. Sans idéaliser cette histoire commune, elle a incontestablement produit une culture à part entière, dont l’apport est consacré, notamment, par la constitution marocaine comme un élément de l’identité nationale de ce pays. Il est urgent de parvenir à préserver cet héritage, à l’heure où les derniers témoins de cette coexistence disparaissent.

(...)
Il existe pourtant une approche basée sur des valeurs communes. C’est cette voie que nous commençons à voir émerger à nouveau en Israël, avec des voix s’élevant contre l’extrême droite, tout comme à Gaza, où certains osent défier le Hamas malgré la répression. Ainsi, le mouvement Standing Together, composé d’Israéliens juifs, musulmans et chrétiens et de Palestiniens, de Cisjordanie et de Gaza, mobilise des citoyens engagés ensemble, de plus en plus nombreux, dans des actions contre l’occupation, pour l’égalité et la justice sociale. Le courage et la détermination de ces activistes qui vivent le conflit dans leur chair, nous obligent.

Comme eux, c’est une société plus unie que nous appelons de nos vœux, tant en Belgique qu’au Proche-Orient.

En tant que citoyen (ne) s de cultures juive et musulmane, nous refusons toute division entre "nous" et "eux". Nous voyons en l’"Autre" un reflet de nous-mêmes et affirmons notre citoyenneté commune au-delà des différences.