Bandeau
LARCENCIEL - site de Michel Simonis
Slogan du site

"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Éduquer les enfants à la vie affective, relationnelle et sexuelle dès la maternelle
Article mis en ligne le 15 août 2018

J’ai pratiqué pendant des années, surtout dans les classes maternelles, le “Cercle magique” ou PRODAS, programme canadien de développement affectif et social, auquel toute l’équipe PMS dont je faisais partie s’était formée avec Jacques Lalanne, venu en Belgique pour promouvoir la pratique du Prodas auprès des intervenants scolaires.

On parle aussi maintenant de “Cercle de parole” (http://www.entre-vues.net/LinkClick.aspx?fileticket=Zmv2LdwuSt8=&tabid=619)
Voir HUWART Sonia, SNOECK Peggy : Cercles de parole à partir de contes pour les 5 à 9 ans - de Boeck et le document “LES CERCLES DE PAROLE DU PROGRAMME DE DEVELOPPEMENT AFFECTIF ET SOCIAL ( PRODAS)” (pdf)) ci-joint.
Jacques Lalanne a publié en juin 2016 avec Christian Bokiau "Se faire comprendre
 Affirmation et bienveillance face aux heurts du quotidien"
(Des pistes pour renforcer sa capacité à communiquer et développer un dialogue enrichissant, en conjuguant affirmation de soi et respect de chacun.), Chronique sociale, 2016.


En première partie, "Il faut éduquer les enfants à la vie affective, relationnelle et sexuelle dès la maternelle", un article d’Annick Hovine et Bosco d’Otreppe, Publié dans La Libre le jeudi 24 mai 2018.

En deuxième partie de l’article, un entretien avec Anne Hodara, institutrice à l’Ecole Plein Air à Uccle, a contribué à y fonder il y a quinze ans la cellule Plein Cœur. (La Libre, même jour)

A quel âge l’école doit-elle parler aux enfants de vie affective et sexuelle  ? Dès la maternelle, répond sans hésiter une étude inédite du Centre d’expertise et de ressources pour l’enfance (CERE), qui vient d’être publiée. En 2012, le décret “Missions de l’enseignement” a été modifié en vue d’y intégrer l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle (Evras) et de généraliser les cours à l’ensemble de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Mais aucune obligation relative au contenu n’est spécifiée, pas plus que la fréquence des animations, ni la manière de dispenser cet enseignement.
Autrement dit  : chaque école doit faire de l’Evras mais elle est libre de le faire à sa manière. Sur le terrain, on constate qu’il reste une certaine frilosité quant à l’organisation de ces cours, surtout dans les classes des plus jeunes élèves. Les raisons sont multiples  : manque de formation et de temps, complexité des questions à aborder, crainte de débordements, peur des réactions des parents…

Sensibiliser au consentement

Dans la foulée du mouvement #MeToo, qui dénonce différentes formes de violences sexuelles faites aux femmes, il est pourtant de plus en plus évident qu’une éducation très précoce à la vie affective est essentielle pour sensibiliser les enfants à la bienveillance et au consentement, insiste l’étude. Il s’agit de déconstruire d’emblée les stéréotypes sexistes et de concevoir une vie relationnelle et sexuelle plus égalitaire et respectueuse.
Au départ de propos recueillis auprès d’une quinzaine d’intervenantes (issues de la pratique et de la recherche), Léa Champagne, auteure de ce travail, fait le point des débats, réflexions et expériences enclenchées dans le secteur. Pour la chercheuse, si les cours d’Evras étaient intégrés dès le début de la scolarité, ils s’inscriraient dans un continuum de l’éducation à la dignité, au respect, à la connaissance, au savoir-être du corps et de la pensée.

On marche sur des œufs

important dans la vie des enfants, indique la chercheuse. Si la transparence vis-à-vis des parents est au cœur du projet Evras, les écoles doivent s’accorder une légitimité de mener ces cours “de façon indépendante des idéaux moraux proposés par les parents”, dit-elle, mais sans se substituer à la responsabilité de l’entourage familial adulte des enfants en matière d’éducation.

On marche là sur des oeufs… Autant certains parents parlent de façon décomplexée d’amour, de relations et de sexe avec leurs enfants, autant c’est compliqué dans d’autres familles d’aborder des sujets liés à l’affectif et au psychosexuel. Interrogée dans l’étude, Catherine Vanesse (de la Fédération laïque des centres de planning familial) explique que chez les parents, les seuils de connaissance vont de 0 à 100, simplement pour nommer les parties du corps, par exemple. “Entre les mots imagés et les mots explicites, réels, les enfants souvent ne comprennent plus rien. A l’école, ils peuvent apprendre à distinguer toutes ces catégories sémantiques”.

Des mots sur le ressenti

D’autant que les familles et l’école doivent compter avec internet et les réseaux sociaux, en accès permanent via les tablettes et les smartphones, qui s’imposent comme acteurs informels dans le débat. On y trouve, pêle-mêle, des contenus dénaturés, incohérents, stigmatisants, irréalistes, fort stéréotypés et humiliants, mais aussi des informations pertinentes et documentées, pointe l’auteure de l’étude. Qui y voit un nouvel argument en faveur de l’éducation sexuelle précoce  : la nécessité de réagir par rapport aux erreurs propagées sur le net, de les corriger et de recadrer les images explicites ou choquantes sur lesquelles les gamins tombent immanquablement en jouant sur les ordinateurs et les téléphones portables.
Dans certains milieux, on préfère éviter le sujet, estimant qu’il ne faut pas parler de pornographie aux enfants de l’école primaire. Ce n’est pas l’avis de Léa Champagne. “Le mieux est de créer un contexte et un espace-temps, où un intervenant écoute l’enfant et l’aide à mettre des mots sur son ressenti”.

Annick Hovine et Bosco d’Otreppe

LLB, le jeudi 24 mai 2018


On apprend à dire aux plus petits : "Non, je n’aime pas que tu me prennes dans tes bras"

Anne Hodara, institutrice à l’Ecole Plein Air à Uccle, a contribué à y fonder il y a quinze ans la cellule Plein Cœur. A l’époque, c’était la première cellule qui offrait des animations Evras dans l’enseignement primaire.

Quel est le champ d’action de votre cellule ?

La cellule travaille autour de deux axes. Face aux questionnements des enfants, nous servons d’abord de relais car nous sommes des personnes ressources. Les élèves, s’ils préfèrent ne pas venir nous voir directement, peuvent par exemple déposer leurs soucis, leurs questionnements, dans une boîte aux lettres. On en assure le suivi régulier pour réagir rapidement si un enfant rencontre des problèmes relationnels à l’école ou dans sa famille. Le deuxième axe est l’organisation, avec les plannings familiaux bruxellois, d’animations sur la vie relationnelle, affective et sexuelle.

Quelles sont les questions les plus souvent posées par les élèves ?

C’est très diversifié. Ils évoquent souvent les relations amicales. Ils témoignent aussi des relations compliquées qu’ils rencontrent dans leur classe et dans leur famille.

Lors des animations en troisième maternelle, par quoi commence-t-on ?

Nous avons établi un canevas progressif. En troisième maternelle, nous organisons des ateliers autour du “J’aime et je n’aime pas”. A cet âge-là, les enfants n’ont généralement pas souvent l’occasion de dire “non”. Or, c’est important de savoir le dire. Nous les aidons à pouvoir se positionner, à dire “Je n’aime pas que tu me prennes dans tes bras”, par exemple. On travaille aussi le schéma corporel. Un enfant s’allonge et on dessine sa silhouette. On nomme les parties de son corps, dont les parties qui différencient les garçons des filles. Mais on le fait sans donner de détails, et avec des mots qui sont audibles pour des enfants de troisième maternelle. On parle aussi des sensations, de la richesse des différences, et de la nécessité de respecter la “bulle” de chacun.

Ces problématiques se précisent alors au fil des années.

Oui. En première et deuxième primaire, on évoque les émotions, les sentiments, mais aussi le genre en essayant d’en déjouer les stéréotypes à travers des ateliers. En troisième et quatrième, les enfants posent souvent des questions relatives à la manière dont on fait les enfants, à la grossesse… Lors de nos animations, on part de lectures. Dans ce cas-ci, les animateurs partent souvent de l’album “Graine de bébé” qui est très bien fait. En cinquième et sixième, on évoque avec les élèves “le trajet des premières fois”. On parle avec eux de toutes les “premières fois” qu’ils rencontreront avant l’âge adulte : le premier poil, le premier baiser… On évoque aussi la puberté, la contraception, les maladies sexuellement transmissibles… Et bien sûr toujours les sentiments !

Les réseaux sociaux, l’accès à la pornographie, vous obligent-ils à revoir vos animations ?

La maturité des enfants ne change pas, mais la majorité des enfants seront amenés à se retrouver un jour face à des images pornographiques même si, en général, ils éteignent assez vite car ils ne sont pas en capacité de les comprendre, et que cela donne une image terrible de la sexualité adulte. Les élèves ont souvent des questions par rapport à cela et donc oui, on en parle. Cela fait aussi deux ans que la médecine scolaire organise des animations spécifiques sur l’utilisation des réseaux sociaux en sixième primaire. Quant à moi, je réfléchis à de telles formations pour les élèves de cinquième. Beaucoup d’enfants de ma classe, déjà en primaire donc, ont vécu des problèmes de harcèlement sur les réseaux sociaux.

Y a-t-il des thématiques que vous n’abordez pas, considérant qu’elles relèvent de l’éducation familiale ?

Non. Et les parents sont en général ravis que l’on prenne en charge les questions relatives à l’Evras.

Toute approche relève d’une vision anthropologique particulière. Comment assurer et garantir la neutralité de telles formations  ?

Nous faisons appel à des animateurs formés des plannings familiaux. Nous avons également défini un règlement d’ordre intérieur, et nous sommes inscrits dans le projet d’établissement qui est présenté aux parents lors de l’inscription. Par ailleurs, nous sommes une école à pédagogie active Decroly, et nous considérons qu’une telle formation est indispensable si nous voulons prendre en compte l’enfant dans sa globalité.

Entretien Annick Hovine et Bosco d’Otreppe