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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
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"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

L’économie sociale a le vent en poupe en Belgique et c’est une bonne nouvelle.
Article mis en ligne le 21 janvier 2020

En Wallonie et à Bruxelles, les acteurs de l’économie sociale, c’est plus de 11.400 entreprises !

Elles s’appellent Les Petits Riens (seconde main, lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale), Smart (prise en charge des formalités administratives des artistes), Médor (médias), Credal (placements éthiques et crédits solidaires), les Grignoux (salles de cinéma) ou encore Agricover (coopérative agricole écologique). Ils ont tous en commun d’être des acteurs de l’économie sociale.

Derrière ces organisations, on retrouve la même philosophie, celle d’entreprendre et de travailler autrement, avec une autre finalité que l’optimisation du profit au bénéfice des actionnaires.

Ici, ce qui compte, c’est de soutenir une activité locale, de retrouver du sens dans l’acte d’entreprendre, de porter des valeurs, de proposer une alternative au système capitaliste ou d’opter pour une gestion démocratique et participative…
Depuis quelques années déjà, l’économie sociale, tant du côté des travailleurs que des consommateurs, a le vent en poupe en Belgique. C’est un fait. Les chiffres l’attestent. Partons de ceux-ci. On estime que dans notre pays 414 000 postes de travail (sans les écoles et les hôpitaux) sont liés à l’économie sociale, soit 11 % de l’emploi salarié en Belgique. Sur les cinq dernières années, ce secteur de l’économie sociale a affiché, en termes de création d’emplois, un taux de croissance 2,5 fois supérieur à celui du reste de l’économie.

Si on se recentre sur la Wallonie et Bruxelles, les acteurs de l’économie sociale ont généré 260 642 emplois en 2018. En 2013, on flirtait seulement avec la barre des 240 000 emplois. Même si elle est encore relativement mal connue du grand public, l’économie sociale représenterait, aujourd’hui, grosso modo 12 % de l’emploi total en Wallonie et en Région de Bruxelles-Capitale.

Les plus gros employeurs sont, dans l’ordre, le secteur de la santé humaine et de l’action sociale générerait plus de la moitié des emplois. Mais ces dernières années, de nouveaux acteurs de l’économie sociale sont également apparus dans des secteurs hautement concurrentiels comme l’alimentation, la finance ou l’énergie. En proposant un autre modèle.

Comment expliquer l’engouement pour ce secteur de l’économie sociale qui voit régulièrement de nouvelles initiatives émerger ? Pointons d’abord les changements dans les habitudes des consommateurs - davantage qu’hier soucieux d’opter pour des modèles de consommation plus sains, durables et éthiques - et qui se tournent vers les entreprises qui répondent à ces critères. Mais le phénomène est plus large. 

"Le citoyen souffre, aujourd’hui,https://www.lalibre.be/economie/ent... explique Sybille Mertens, chargée de cours à HEC Liège (lire ci-dessous) de ne pas avoir la main sur ce qu’il lui arrive dans ses relations économiques. Il commence à percevoir les acteurs de l’économie sociale comme une manière de se réapproprier l’activité économique. Nous voyons cela au niveau des choix des consommateurs. Surtout dans le domaine de l’agroalimentaire mais on observe aussi un intérêt grandissant des étudiants et des futurs travailleurs que ce soit en France, au Canada ou en Belgique : des étudiants sortant de business school ne veulent pas aller travailler dans certaines entreprises car ils ne se sentent pas en phase avec leurs valeurs. Nous le voyons aussi au niveau des investissements des épargnants", explique-t-elle. Et de conclure : "Dans ses actes économiques, le Belge a envie de retrouver la maîtrise de ce qu’il consomme plutôt que d’accepter les délocalisations ou d’acheter des produits à des entreprises dont il ne partage pas les valeurs. Cela ne concerne pas toute la population mais je dirais qu’entre 15 et 20 % des gens réfléchissent très sérieusement aux modèles d’entreprises avec lesquels ils veulent interagir."

***

Certes, tout n’est pas parfait, loin de là : les conditions de travail sont parfois éprouvantes, voire précaires - le temps partiel reste très présent - et les rémunérations évidemment nettement en deçà de ce qu’il est possible d’obtenir dans le secteur privé. Et pourtant, ces acteurs de l’économie sociale engagent chaque année davantage de personnes, majoritairement des femmes. Une dynamique qui ne se dément pas et qui répond à une quête de sens à la fois du côté des consommateurs, qui optent de plus en plus pour des comportements plus sains et durables, mais aussi du côté des salariés qui entendent dans leur travail incarner certaines valeurs.

Les pouvoirs publics l’ont bien compris. Tant à Bruxelles qu’en Wallonie, les gouvernements régionaux, sous la législature précédente et sous l’actuelle, ont mis en place une série d’instruments et incitants financiers pour stimuler cet écosystème social et faciliter aussi la capacité de ses acteurs à grandir (plus de 90 % de nos entreprises sociales emploient moins de 50 travailleurs).

Cet élan doit être poursuivi et encouragé. Car dans une société de plus en plus numérisée, désincarnée, et dans laquelle quelques géants surpuissants dictent leur loi, le citoyen reste à l’affût d’un autre modèle économique : plus local, plus social, plus humain. Un modèle dans lequel il deviendra plus qu’un simple consommateur mais bien un "consomm-acteur", c’est-à-dire un citoyen davantage libre de ses choix, retrouvant la maîtrise de ses actes économiques. C’est vrai évidemment dans des domaines historiques de l’économie sociale comme l’insertion professionnelle, la formation ou les soins de santé. Mais cela l’est également de plus en plus dans de nouveaux domaines comme l’énergie, la finance ou encore l’alimentation. C’est réjouissant car cela démontre qu’une alternative est toujours possible.

Voir l’article de Sylvie Mertens, ici.