Bandeau
LARCENCIEL - site de Michel Simonis
Slogan du site

"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Edito : faire face à l’effondrement qui vient
Vigilance et discernement.

Remise en exergue de l’EDITO de décembre 2021

Article mis en ligne le 7 février 2023
dernière modification le 11 février 2023

Décembre 2021

Gorges de la Nesque - Photo Michel Simonis

Des changements sont dorénavant irréversibles. L’avenir est tellement incertains que beaucoup évoquent sinon la fin du monde du moins la fin d’un monde.

Pierre Rabhi, "militant de la joie plutôt que de la décroissance” (Libération, 5/12/2021) vient de clore sa vie extraordinaire. Cyril Dion qui a beaucoup travaillé avec lui, notamment à l’émergence des "Oasis en tous lieux" et des collectifs Colibris, s’est plus orienté maintenant, après ses deux films phares, “Demain” et “Animal” (qui vient de sortir), vers un "nouveau récit", comme il aime à le dire.

Pour s’en sortir et ne pas sombrer, le meilleur remède : agir

La nuance n’est pas une démission, elle est fondement de l’action.

Devant la complexité des questions qui se posent, la lucidité est impérative.

"la conscience de la complexité humaine conduit à la bienveillance. " (Edgar Morin, 2021)
Entendons les leçons si impérieuses d’Edgar Morin incitant à la rigueur (difficile) de la complexité.

Puis, encore mieux, vous pourrez lire l’essentiel de son dernier message : Credo et Mémentos.

Edito de décembre 2021

Il est dorénavant acquis dans l’opinion que le changement climatique n’est plus seulement à venir mais qu’il affecte déjà notre vie quotidienne et nos chances de survie. La biodiversité s’effondre. La sixième extinction massive est à l’oeuvre. La surexploitation des forêts, des océans, des animaux sauvages, du sous-sol et même des fonds marins rend l’avenir tellement incertains que beaucoup évoquent sinon la fin du monde du moins la fin d’un monde. Des changements sont dorénavant irréversibles. Si on arrêtait aujourd’hui totalement l’exploitation des énergies fossiles (un rêve toutefois irréaliste), il faudrait 50 ans à la planète pour arrêter de se dégrader.

Certes, la planète survivra (La nature est résiliente) mais peut-être pas l’humanité.
Si Pierre Rabhi [1], sans parti, militant de "la joie" plutôt que de "la décroissance” (Libération, 5/12/2021), qui vient de clore sa vie extraordinaire [2], a bien fait avancer les prises de conscience en incitant chacun à faire sa part et à prendre conscience que le changement doit aussi être personnel et intérieur, Cyril Dion qui a beaucoup travaillé avec Pierre Rabhi, notamment à l’émergence des "Oasis en tous lieux" et des collectifs Colibris, s’est plus orienté maintenant, après ses deux films phares, “Demain” et “Animal” (qui vient de sortir), vers un "nouveau récit", comme il aime à le dire.

Dans ce nouveau récit de cyril Dion, le changement individuel (évidemment nécessaire) est et sera impuissant face aux immenses machines prédatrices qui mettent la planète à sac : il faut soutenir des actions plus radicales, comme celles qui sont développées par la jeune génération, consciente que si on ne change pas radicalement de modèle de société, elle n’aura pas d’avenir. [3]

Comment ne pas sombrer dans la dépression, le catastrophisme ou embarquer dans la révolte violente ?

Pour s’en sortir et ne pas sombrer, le meilleur remède : agir (mais agir, ce n’est pas seulement "faire", c’est aussi contempler, méditer dans la nature, chanter, célébrer...) !

Pour cela, la lucidité est impérative.

La nuance aussi. Elle n’est pas une démission, elle est fondement de l’action.

Devant les solutions à l’emporte pièce qui fleurissent partout (c’est tellement plus facile que d’affronter la complexité), il convient de sortir du tout noir ou tout blanc, et toutes les autres dichotomies (gauche-droite ; masculinité-féminité ; rationalité-subjectivité ; "grands principes"-"grands sentiments" ; socialisme-libéralisme ; physique-mental ; matérialisme-spiritualisme...), et entendre les leçons si impérieuses et si peu écoutées d’Edgar Morin incitant à la rigueur (difficile) de la complexité.

A la fin de son dernier livre, "Leçons d’un siècle de vie", Edgar Morin, qui approche de ses 100 ans, livre quelques belles pages qui tournent autour de la complexité.

"Après ces premières lectures (Dostoïevski, Anarole France, Pascal, Hegel), Montaigne a approfondi mon scepticisme et m’a incité à l’auto-examen, puis Voltaire et Rousseau, complémentaires dans leur antagonisme, de même que les Lumières et le romantisme, la rationalité et le mysticisme (sans Dieu), l’invisible et le visible. Grâce à ces lectures, j’ai acquis le sentiment profond des doubles et multiples aspects des êtres humains, de leurs histoires singulières, de la grande Histoire qui nous emporte tous.

Chacun porte en soi le double impératif complémentaire du Je et du Nous, de l’individualisme et du communautarisme, de l’égoïsme et de l’altruisme.

La conscience de ce double impératif s’est profondément enracinée dans mon esprit au fil des années. Elle m’a toujours poussé à entretenir et à fortifier la capacité d’amour et d’émerveillement en même temps que la résistance obstinée à la cruauté du monde.

Je dirai enfin que la conscience de la complexité humaine conduit à la bienveillance. La bienveillance permet de considérer autrui non seulement dans ses défauts et ses carences, mais aussi dans ses qualités, à la fois dans ses intentions et ses actions." (Edgar Morin, Leçons d’un siècle de vie, 2021)

Je vous partage, en forme de message de Noël, des extraits de son "Credo" et de son "Mémentos".
Un noël qui dépasse les chapelles et qui s’ouvre à tout le monde, chacun selon ce en quoi il croit, parce que le message, à mon sens, touche à l’universel.

Après quoi il sera temps de vous présenter quelques exemples, pour exercer notre pensée "complexe"...

Credo (extraits)

Parfois je suis submergé par l’amour de la vie.

Quelle beauté, quelle harmonie, quelle unité profonde, quelle complémentarité et solidarité entre les vivants ! Quelle force créatrice pour inventer des myriades d’espèces animales et végétales singulières ! Parfois je suis submergé par la cruauté de la vie, la nécessité de tuer pour vivre, son énergie destructrice, ses conflits, avec toujours le triomphe de la mort. Puis je réussis à réunir, maintenir, lier indissolublement les deux vérités contraires. La vie est cadeau et fardeau, la vie est merveilleuse et terrible.

Ainsi en est-il de l’univers tel que nous le connaissons désormais. Il semble à notre regard harmonie parfaite, apparemment éternelle. Mais il est à notre science expansion, chaos, explosions ou tamponnements d’étoiles, avalement d’astres par d’incroyables et innombrables trous noirs, et enfin destruction et désintégration irrévocables. La vie, dans cet univers, est peut-être unique - dans une petite planète d’un soleil de banlieue -, en tout cas marginale.

Évidemment, les mêmes antinomies m’apparaissent inséparables dans l’histoire de l’humanité comme dans coutes les histoires que sont les vies individuelles. Tant de bonté, de générosité, de dévouement, tant de méchanceté, de vilenie, d’égoïsme. Tant d’intelligence, d’astuce, de génie créateur, tant de bêtise, d’aveuglement, d’illusions et d’erreurs. Quelle merveilleuse et quelle terrible puissance de l’imaginaire dans l’esprit humain qui crée les chefs-d’œuvre de la poésie, des littératures, des arts, et qui s’asservit en adorant et en implorant les dieux et les mythes qu’il a créés.

Ce double et multiple aspect, cette complexité dans tout ce qui est - depuis la particule, qui est aussi une onde, jusqu’à l’âme humaine, inséparable des interactions entre milliards de neurones -, voilà ce qui est toujours présent à mon esprit. C’est la leçon première de toutes mes expériences.
(...)

Chacun porte en soi le double impératif complémentaire du Je et du Nous, de l’individualisme et du communautarisme, de l’égoïsme et de l’altruisme.

La conscience de ce double impératif s’est profondément enracinée dans mon esprit au fil des années. Elle m’a toujours poussé à entretenir et à fortifier la capacité d’amour et d’émerveillement en même temps que la résistance obstinée à la cruauté du monde.

Je dirai enfin que la conscience de la complexité humaine conduit à la bienveillance. La bienveillance permet de considérer autrui non seulement dans ses défauts et ses carences, mais aussi dans ses qualités, à la fois dans ses intentions et ses actions.
(...)

Finalement, il est bon d’être bon, on se sent bien d’être pour le bien, le sens de la complexité permet de percevoir les aspects différents et contradictoires des êtres, des conjonctures, des événements, et cette perception favorise la bienveillance.

Ma leçon ultime, fruit conjoint de toutes mes expériences, est dans ce cercle vertueux où coopèrent la raison ouverte et la bienveillance aimante.

***

Mémentos (extraits)

  • Vivre dans l’incertitude
  • Vivre est naviguer dans un océan d’incertitudes en se ravitaillant dans des îles de certitudes.
  • Attends-toi à l’inattendu.
  • L’histoire humaine est relativement intelligible a posteriori mais toujours imprévisible a priori.
  • Aucun acquis historique n’est irréversible.
  • L’humain n’est ni bon ni mauvais, il est complexe et versatile.
  • Quand l’immédiat dévore, l’esprit dérive.
  • L’élimination totale du risque conduit à l’élimination totale de la vie.
  • Le principe de précaution n’a de sens qu’associé à un principe de risque, indispensable à l’action et à l’innovation.
  • Le chemin vers l’avenir passe par le retour aux sources.
  • L’espérance est l’attente de l’inespéré.

Hygiène mentale

  • Ceux qui n’ont pas de haine échappent aux démences.
  • On réfute en argumentant, non en dénonçant.
  • À la doctrine qui répond à tout, plutôt la complexité qui pose question à tout.
  • Pour bien vieillir, il faut garder en soi les curiosités de l’enfance, les aspirations de l’adolescence, les responsabilités de l’adulte, et dans le vieillissement essayer d’extraire l’expérience des âges précédents.
  • Je ne cesserai jamais de percevoir ce qu’il y a de cruel, implacable, impitoyable dans l’humanité, ni ce qu’il y a de terrible dans la vie, ni de percevoir non plus ce qu’il y a de noble, généreux, bon dans l’humanité et ce que la vie a d’enchanteur et d’émerveillant.
  • Nous devons souvent affronter cette contradiction éthique : respecter toute personne humaine et ne pas l’offenser dans ce qui lui est sacré, et en même temps pratiquer l’esprit critique qui est animé par l’irrespect des croyances imposées comme sacrées.
  • L’autocritique est une hygiène psychique essentielle. Il importe de ne pas être réaliste au sens trivial (s’adapter à l’immédiat) ni irréaliste au sens trivial (se soustraire aux contraintes de la réalité), il importe d’être réaliste au sens complexe : comprendre l’incertitude du réel, savoir qu’il y a du possible encore invisible.
  • Je critique des idées, je n’attaque jamais des personnes. Ce serait me dégrader que de les dégrader.

Vivre avec la crise

  • On devrait chercher un vaccin contre la rage spécifiquement humaine, car nous sommes en pleine épidémie.
  • La crise du Covid est en un sens une crise d’une conception de la modernité fondée sur l’idée que le destin de l’homme était de maîtriser la nature et de devenir le maître du monde.
  • Le Covid nous rappelle que nous vivons une Aventure, une Aventure dans l’inconnu, l’Aventure inouïe de l’espèce humaine.

Mystère

  • La Réalité se cache derrière nos réalités.
  • L’esprit humain est devant la porte close du Mystère.

Michel Simonis, Noël 2021


Quelques exemples concrets.

(Puisque le Mystère et la Réalité se cache aussi dans la complexité de nos vies quotidiennes...)

Je vous ai promis quelques exemples. En voici déjà deux qui sont au coeur de l’actualité : le chauffage au bois et les voitures électriques. En quelques mots, je reprends des extraits d’articles parus dans l’Express.

Déjà, j’ajoute quelques réflexions sur l’action dans le cadre du réchauffement climatique : vous allez trouver quelques articles sur mon blog L’arcenciel et ici même au sujet, beaucoup plus vaste, de la façon dont on peut réagir face à la transition climatique... Très instructif ! Voir les liens ci-dessous.

Déjà en 2011, dans Larcenciel, j’avais inauguré une rubrique “Rouages”, avec notamment un article sur “L’effet rebond” [4]

1. Climat : le chauffage au bois est-il écologique ?

Les besoins croissants en combustibles et en matériaux entraînent des coupes trop rapides dans les forêts, alertent les scientifiques. Le reboisement ne peut pas suivre.

le développement effréné de la filière bois n’est pas vraiment bon pour le climat.

Lire la suite dans l’article "Climat : le chauffage au bois est-il écologique ?"

2. Voiture électrique : un problème plus qu’une solution ?

Malgré le battage médiatique de l’industrie, la voiture électrique est à considérer comme une pièce du puzzle de la transition écologique et non comme une panacée. La simple substitution des véhicules thermiques par des véhicules électriques ne nous fera pas sortir de la crise climatique. C’est toute la logique de la mobilité qui est à repenser, au lieu de se baser sur le dogme d’une possible croissance économique infinie.

Lire la suite dans l’article "Voiture électrique : un problème plus qu’une solution ?"

On ne quitte pas tout à fait le sujet en abordant la question du bois par un autre biais.

Agir dans la transition climatique

- sur mon blog :

- Dans mes "perles" (Pearltrees)  : Agir dans la transition, quatre textes en anglais et leur traduction

- Et voir ici dans LARCENCIEL  :