Des professionnels et des experts (flamands) du monde pénitentiaire l’ont fait. Leur projet alternatif restera-t-il un rêve ?
Des prisons surpeuplées, qui entassent, ensemble, des condamnés et des prévenus, qui mêlent les primo-délinquants aux gros caïds, qui enferment sans donner d’espoir. Des établissements pénitentiaires qui tombent en ruine ou des bâtiments modernes déshumanisés. Le tableau du monde pénitentiaire belge, en crise permanente, est bien sombre. Aujourd’hui, la prison prépare davantage à la récidive qu’à la réinsertion.
Partant de ce constat, quelques personnes issues du milieu pénitentiaire flamand, mais aussi des architectes, des scientifiques, des professeurs d’université, des étudiants, des hommes politiques ont planché ensemble, dans le sillage de la Ligue des droits de l’homme, sur une vision (très) alternative au concept pénitentiaire classique (largement dépassé). Baptisé "Huizen" ("Maisons"), le projet était présenté mardi dans le logement de fonction du directeur de la prison d’Audenarde, qui est aussi le secrétaire de l’ASBL "Huizen".
Radicalement différent
Il propose une approche radicalement différente de celle privilégiée aujourd’hui. Premier coup de pelle : on ferme les 35 grandes (voire très grandes) prisons actuelles et on les remplace par des centaines de "maisons de détention", pour une dizaine de détenus. Voilà qui évite, selon les concepteurs, la stigmatisation de la prison et permet de s’adapter de manière plus flexible et plus souple aux besoins individuels des détenus.
Deuxième principe : la différenciation. Il y a plusieurs types de "maisons de détention" qui se distinguent par le niveau de sécurité, le régime de détention et l’accompagnement : des maisons "de crise", des maisons d’arrêt, des maisons très sécurisées (avec régime de base ; ou avec formation professionnelle ; ou avec programme spécial) ; des maisons fermées ; des maisons ouvertes.
Chaque détenu se voit attribuer un accompagnateur personnel (un coach) chargé de le suivre dans l’exécution de son plan de détention et de reclassement, à tous les stades. Après la condamnation, un "plan de solution" est mis sur pied pour préparer le reclassement dès le premier jour de détention. Le détenu est donc amené à suivre un parcours progressif à travers les différents types de maisons de détention.
Un refuge pour chiens, un atelier d’artiste
Troisième axe du projet "Huizen" : la proximité. Les maisons de détention sont implantées dans les villes, les quartiers et les zones rurales. Pour favoriser l’implication des détenus vis-à-vis des victimes et de la société. Et vice-versa. Pour que les actes de réparation effectués par les détenus jouent aussi un rôle économique, social ou culturel dans leur environnement immédiat. Ces maisons de détention pourraient apporter une plus-value au quartier en proposant un atelier de réparation de vélos, un refuge pour chiens, un restaurant social, un magasin de légumes, des parkings, un atelier d’artiste, une salle de spectacle , avancent les concepteurs. C’est un moyen concret pour stimuler la responsabilité des détenus envers la société qu’ils réintégreront finalement - et réciproquement.
A l’appui de son projet, "Huizen" présente des maquettes, des plans, des tableaux, des propositions juridiques, des calculs et des tableaux qui prennent en compte les désavantages de la formule : les surcoûts liés à une détention à petite échelle et le syndrome Nimby (pas dans mon jardin). Allez, on rêve ?
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(un site en construction)
Annick Hovine
LLB, Mis en ligne le 06/03/2013
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