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Michel Simonis

L’ONU appelle à punir l’industrie pétrolière qui "savait".
18 janvier 2023
Article mis en ligne le 8 février 2023
dernière modification le 11 février 2023

L’ONU appelle à punir l’industrie pétrolière pour avoir caché ce qu’elle savait sur le climat.

Dès les années 1980, le géant pétrolier ExxonMobil disposait de prédictions sur le réchauffement climatique d’une justesse remarquable, qui se sont révélées être précisément ce qui s’est produit plusieurs décennies plus tard.

L’Obs avec AFP
Publié le 18 janvier 2023

Un « grand mensonge » : le secrétaire général de l’ONU a appelé ce mercredi 18 janvier à poursuivre les majors pétrolières pour avoir caché pendant des années les informations dont elles disposaient sur le réchauffement climatique.

« Certains géants pétroliers ont colporté le grand mensonge » sur le réchauffement climatique, a dénoncé à Davos le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, quelques jours après la publication d’une étude sur ce que savait la major américaine ExxonMobil de ce risque il y a quarante ans.

Il y a 50 ans, ce que Total savait de l’impact de ses activités sur le réchauffement climatique

« Certains producteurs d’énergies fossiles étaient parfaitement conscients dans les années 1970 que leur produit phare allait faire brûler la planète. Mais comme l’industrie du tabac, ils ont fait peu de cas de leur propre science. Certains géants pétroliers ont colporté le grand mensonge », a affirmé le dirigeant présent au Forum de Davos.

Dès les années 1980, le géant pétrolier ExxonMobil disposait de prédictions sur le réchauffement climatique d’une justesse remarquable, réalisées par ses propres scientifiques, et qui se sont révélées être précisément ce qui s’est produit plusieurs décennies plus tard, a confirmé une étude dans la prestigieuse revue « Science ». Or l’entreprise a pendant des années publiquement jeté le doute sur l’état des connaissances scientifiques en la matière, a également souligné cette publication.
Double discours

Selon Antonio Guterres, « les responsables doivent être poursuivis » comme les cigarettiers l’ont été. Une référence aux 246 milliards de dollars que les géants du tabac aux Etats-Unis avaient accepté de payer en 1998 à 46 Etats sur une période de vingt-cinq ans, afin de couvrir les coûts engagés pour soigner d’anciens fumeurs.

Depuis plusieurs années déjà, ExxonMobil est accusé d’avoir tenu un double discours sur le changement climatique provoqué par les immenses quantités de gaz à effet de serre rejetées par l’humanité dans l’atmosphère, notamment via la combustion de charbon ou de pétrole pour produire de l’énergie.

En 1980, on parlait déjà de la tragédie à venir du réchauffement climatique

Après la publication dans la revue « Science », un porte-parole de la compagnie a déclaré à l’AFP que « cette question a fait plusieurs fois surface ces dernières années », ajoutant qu’« à chaque fois, notre réponse est la même : ceux qui évoquent ce que Exxon savait ont faux dans leurs conclusions ».

La question de l’impact de l’industrie pétrolière sur la planète se fait d’autant plus pressante aujourd’hui que « chaque semaine amène son lot d’histoires horrifiantes », s’est inquiété le secrétaire général de l’ONU, qui parle de « flirt avec le désastre climatique ». Jeudi dernier, l’Organisation météorologique mondiale a confirmé que les huit dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées.

« Cette folie relève de la science-fiction »

« Il faut que le pétrole reste en terre », a exhorté de son côté la militante équatorienne d’Amazonie de 20 ans, Helena Gualinga, dans un entretien à l’AFP en marge de la réunion du Forum économique mondial. Elle est, avec Greta Thunberg et d’autres jeunes militants, l’un des nouveaux visages de la mobilisation contre le changement climatique.
Mais ce n’est pas la direction que prend l’industrie pétrolière, se désole Antonio Guterres : « aujourd’hui, les producteurs de combustibles fossiles et ceux qui les soutiennent continuent de se battre pour accroître la production, tout en sachant pertinemment que leur modèle économique est incompatible avec la survie de l’humanité ». « Cette folie relève de la science-fiction », a-t-il martelé.

« Qui aurait pu prédire la crise climatique ? » Eh bien, beaucoup de gens, monsieur le président… [1]

Plus largement, le secrétaire général de l’ONU a fustigé les engagements climatiques « douteux » ou « obscurs » de nombreuses entreprises sur un objectif de zéro émission de carbone : cela « induit en erreur les consommateurs, les investisseurs et les régulateurs avec de faux récits », et ouvre la porte au « greenwashing ».

« Nos engagements climatiques nécessitent l’engagement complet du secteur privé », a-t-il insisté, estimant que « la bataille pour tenir l’objectif de 1,5 degré de réchauffement climatique sera gagnée ou perdue au cours de cette décennie ».

Par L’Obs avec AFP