Extraits
On a eu récemment quelques événements inquiétants qui ramènent chaque fois à la question de l’autorité, de l’éducation des enfants et des jeunes. On a envie de réfléchir à cela. Beaucoup de professionnels confrontés à des familles en difficulté avec l’exercice de l’autorité se disent dépassés. On veut leur donner des outils pour mieux les accompagner. On abordera aussi l’autorité à l’école et dans l’espace public. On entend beaucoup de politiques qui prennent la parole en avançant des solutions toutes faites mais qui ne semblent pas toujours réalistes. On a envie d’avoir une parole sur ce sujet.
Vous présentez ce mercredi votre troisième dernier rapport. Qu’est-ce qui en ressort ?
Je reprendrais ce qui est pour moi un leitmotiv depuis le début de mon mandat : on ne voit pas assez les compétences, les ressources, les talents et l’intelligence des enfants. On continue à les traiter comme des objets et pas comme des sujets de droit. On l’a beaucoup vu pendant la pandémie. Ils ne sont pas considérés comme des interlocuteurs valables. On les montre quand ils sont en indélicatesse avec les autorités, en souffrance ou en révolte. C’est une manière de les invisibiliser ou de les visibiliser d’une mauvaise manière.
Vous dites que les jeunes subissent toujours les conséquences désastreuses des mesures sanitaires liées à la pandémie ?
Oui, et je ne suis pas certain que tout le monde les a bien mesurées. On a dénoncé plusieurs fois à l’époque la manière dont les gamins des quartiers populaires étaient poursuivis, de manière déraisonnable à mon sens, dès qu’ils sortaient de chez eux. Quand on voit le déferlement de violence et d’agressivité dans les rues de certains, ce sont ces mêmes jeunes. Leur ressentiment par rapport à la société, qui était déjà présent avant la pandémie, a été renforcé. Aujourd’hui, les signaux sont au rouge foncé dans les services de première ligne, notamment de santé mentale : ils sont complètement dépassés. C’est très préoccupant.
Vous pointez aussi la pauvreté dans laquelle s’enfoncent des milliers de nouvelles familles.
La crise énergétique et l’inflation, ce ne sont pas que des mots : ce sont des drames humains qui se jouent chaque jour. On en est très conscients. On a de plus en plus de questions et de plaintes à ce sujet. J’avoue que je termine deux mandats sur une note extrêmement inquiétante sur cette question de la pauvreté. En particulier, en ce qui concerne les enfants dans l’exil, qui restent les fragiles parmi les fragiles. Des gamins en rue, comme aujourd’hui, je n’avais jamais connu ça.
Annick Hovine
Journaliste
Publié dans La Libre le le 11-01-2023