Bandeau
LARCENCIEL - site de Michel Simonis
Slogan du site

"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

L’agroforesterie ouvre de belles perspectives
Article mis en ligne le 23 décembre 2018
dernière modification le 26 avril 2021

L’agroforesterie est de plus en plus présentée comme une forme d’agriculture prometteuse, partout dans le monde. Mais qu’entend-on précisément par là ?

L’agroforesterie est un mode d’exploitation des terres agricoles associant des arbres et des cultures ou animaux d’élevage. Une telle combinaison peut s’avérer porteuse, en particulier dans le contexte de changement climatique. En effet, les arbres jouent un rôle de climatiseur
et de réserve de carbone tout en offrant une protection contre la sécheresse. En outre, l’utilisation des arbres engendre plus de rendement pour la production agricoletout en favorisant une plus grande biodiversité.

Vergers de hautes tiges et ‘home gardens’

Notons que l’agroforesterie ne date pas d’hier. Si le concept-même a été lancé au début du 20e siècle, sa mise en pratique remonte quant à elle à l’époque romaine, voire plus tôt encore. Partout dans le monde, les exemples sont légions. Ainsi dans les régions tempérées, le bétail pâture dans des vergers de hautes tiges. Pensez également aux rangées de saules têtards ou aux haies qui entourent les champs et prairies. Dans les régions tropicales humides, l’agroforesterie se manifeste notamment sous la forme de jardins privés (home gardens) : un mélange de cultures pérennes et annuelles jouxtant les maisons. Dans ceux-ci, au moins trois niveaux végétaux s’enchevêtrent : des grands arbres (environ 20 m) pour les fruits, le bois, l’ombre et le fourrage ; des arbres plus petits comme les bananiers ou les caféiers ; et enfin les légumineuses, les tubercules et des herbes aromatiques pouvant atteindre jusqu’à 1,50 m. Malheureusement, l’industrialisation de l’agriculture à partir des années 1950 a précipité la disparition progressive de nombreux arbres et arbustes du paysage agricole.

Dans les régions tropicales humides, l’agroforesterie se manifeste notamment sous la forme de jardins privés (home gardens) : un mélange de cultures pérennes et annuelles jouxtant les maisons.

Un sentier de terre dans un bois avec une cabane de bois et un ’home garden’ en Indonésie © IRD

Un concept bien pensé

Avec le concept « moderne » d’agroforesterie, les arbres sont plantés avec beaucoup de soin, souvent en rangées, mais parfois aussi de manière éparse. La densité des plants revêt une importance particulière, soit environ 50-100 arbres par hectare à 25-50 m les uns des autres. Une telle disposition laisse suffisamment d’espace pour la circulation des machines agricoles. Il convient également d’éviter les interactions négatives potentielles entre les arbres et les cultures. Par exemple, le noyer et l’eucalyptus peuvent freiner la croissance de certaines cultures. Des plantes peuvent également se disputer l’eau. Dans les régions tempérées, les agriculteurs peuvent éviter ce problème en intégrant une culture hivernale. Au printemps, ce type de culture absorbe rapidement l’eau présente dans les couches supérieures du sol, ce qui oblige les arbres à s’enraciner plus profondément.

Revenus supplémentaires

Pour augmenter ses revenus, l’agriculteur doit bien entendu choisir des arbres « utile » car produisantdubois, des fruits ou encore des aliments pour le bétail, du miel ou autres substances ayant des vertus médicinales… Par exemple, dans les régions tempérées, le noyer, le pommier, le poirier, le frêne et le merisier conviennent tout à fait. Ils peuvent se combiner avec des cultures annuelles (céréales, protéagineux, légumes) comme pluriannuelles (asperges, baies, herbes…).

Sous les tropiques, les agriculteurs disposent d’un large éventail de possibilités. Ils peuvent opter, entre autres, pour des légumineuses telles que le Faidherbia en Afrique ou le tara dans les Andes, qui augmentent la quantité d’azote dans le sol, et pour des arbres et arbustes à usages multiples, qui présentent de nombreuses propriétés. Dans cet article, nous nous en tiendrons au Moringa oleifera, un arbre miraculeux qui pousse dans les sols sablonneux peu fertils au pied de l’Himalaya. Les feuilles et les fruits du Moringa ont une valeur nutritionnelle très élevée (protéines, fer, potassium, calcium, vitamine A et C…) et des vertus médicinales contre une myriade de maladies. De ses graines, on peut de plus extraire une huile semblable à l’huile d’olive. En outre, le Moringa pousse vite et résiste très bien à la sécheresse.

Ces arbres exigent une taille annuelle, surtout pendant leurs 10 à 15 premières années. En revanche, les bois de taille sont très utiles pour faire du feu, pour apporter des nutriments au sol, entre autres.

Un champ d’ananas et d’arbres Casuarina en Chine. © IRD

De nombreux avantages

En tout état de cause, l’agroforesterie offre de nombreux avantages si elle est pratiquée avec discernement ; en voici les principaux :

  • Pour 500-100 arbres par hectare – par exemple noyer/froment –, 1 hectare peut générer un rendement équivalent à celui de 1,4 hectare où les arbres et les cultures sont séparés.
  • La croissance des arbres est plus rapide que dans la sylviculture traditionnelle en raison d’une concurrence moins importante. Les cultures bénéficient de nutriments supplémentaires dans le sol et d’une protection contre les conditions climatiques extrêmes telles que le vent, les fortes pluies, les rayons ardents du soleil et la sécheresse. Par exemple, la teneur en protéines des céréales est sensiblement plus élevée dans l’agroforesterie que dans une monoculture.
  • Les arbres fournissent des produits supplémentaires (voir ci-dessus) et donc davantage de revenus.
  • La production de bois de qualité supérieure réduit la pression sur les forêts tropicales.
  • Les arbres augmentent la fertilité du sol. Grâce à leurs racines profondément ancrées, ils font remonter vers la surface les éléments nutritifs qui enrichissent le sol grâce aux feuilles mortes, mais les agriculteurs peuvent également éparpiller des copeaux de bois sur le sol.
  • Les arbres freinent la pluie ou le vent et limitent ainsi le dispersement de particules fertiles provoquant l’érosion des sols..
  • Les arbres stockent une quantité supplémentaire de carbone, qui s’élève à plus de 2 tonnes par hectare et par an dans les régions tempérées.
  • Les arbres renforcent la biodiversité : chauves-souris, oiseaux, vers de terre… La faune et la flore des sols s’enrichissent également.
  • Le développement de la biodiversité entraîne une diminution du nombre de maladies et de ravageurs de cultures.
  • Les arbres font de l’ombre aux vaches et autres animaux d’élevage. Les poules sont plus sereines et saines lorsqu’elles sont à l’abri du soleil. De plus, beaucoup d’arbres constituent également une ressource fourragère riche en minéraux.
  • Pour les touristes et les riverains, les parcelles où l’on pratique l’agroforesterie semblent bien plus agréables que les tristes monocultures.
     
    Chris Simoens
    GLO.BE
    29 octobre 2018
    © IRD

www.worldagroforestry.org/

Principales sources

Agroforestry (Wervel). Document en néérlandais

Agroforestry fact sheet (INRA). Document en Anglais

Voir aussi : https://www.glo-be.be/fr/articles/des-arbres-miraculeux-sur-les-collines-arides-du-sud-de-lequateur

Pour en savoir plus

L’agroécologie en pratiques (Agrisud)

PDF de 188 pages, très intéressant à télécharger