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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
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"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Quand Google met la planète sous écoute
Article mis en ligne le 14 octobre 2010
dernière modification le 15 octobre 2010

Google est un outil prodigieux. Au début, ses concepteurs avaient de très belles idées comme de mettre le savoir à la disposition de tous. En gros, c’est en bonne voie.
Google est génial. Je l’utilise pour mes recherches, pour les Blogs, pour transférer des photos, pour une partie de mon courriel...

Mais...
Le succès commercial et financier de Google (devenu la plus importante capitalisation au monde) ne lui monte-t-il pas à la tête ?
En tout cas, les dérives s’additionnent...

Voici des extraits d’un article paru dans le n° 83 (automne 2010) de "Secouez-vous les idées" (Cesep) qui donne froid dans le dos. Pour lire tout l’article, voir, p. 9 et 10.

Si je vous en parle, ce n’est pas tant pour dénoncer que pour avertir et inciter chacun à un maximum de discernement. A noter aussi que tout le courrier Gmail est passé au crible, analysé par les machines de Google. Autant savoir !

Chroniques du numérique

Chroniques du numérique se penche sur des sujets " chauds " de la société de l’information et des médias. Sur des faits, des situations et des questions qui interpellent ou devraient interpeller. Avec un regard parfois léger, souvent amusé, toujours critique.

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Quand Google met la planète sous écoute

C’est fascinant et effrayant tout à la fois : des centaines de véhicules drapés du fanion Google mitraillent les artères des grandes villes ; rues, bâtiments, maisons mais aussi passants et jardins : cela photographie à tout va. En passant, elles aspirent les données des bornes WiFi qui fleurissent un peu partout. Rendez-vous dans Street View, l’application Google qui reste à votre écoute. En permanence...

France, année 2009. Extrait du rapport de la CNIL (Commission Nationale Informatique et Libertés). " Monsieur et Madame B découvrent sur Internet que le module " Street View " de l’application " Google Maps " permet d’accéder à des vues de leur domicile. Ils sont stupéfaits de constater que ce service de Google diffuse des vues de l’intérieur de leur propriété sur lesquelles on aperçoit leur fille âgée de quatre ans en sous-vêtements. Considérant ces vues comme attentatoires à leur vie privée et dangereuses pour la sécurité de leur fille, Monsieur et Madame B utilisent le formulaire mis en place par Google pour demander leur suppression. N’obtenant pas satisfaction, ils saisissent la CNIL qui intervient directement auprès de Google France. Google indique en réponse que les vues concernées ont été supprimées ".

Mettre le monde en boîte

Silicon Valley, mai 2007 : Google lance Street View. La nouvelle application disponible dans l’application de cartographie Google Maps a des effets saisissants. Grâce à Street View, l’internaute navigue avec un réalisme impressionnant dans la baie de San Francisco et dans les rues de New York, Las Vegas, Denver et Miami. Le visiteur peut tourner à 360°, avancer, reculer et même tourner dans certains carrefours. Pour accomplir cette prouesse, Google a équipé des voitures bien réelles d’un appareillage sophistiqué qui prend des clichés panoramiques des lieux pour les reconstituer ensuite dans Street View en environnement 3D. D’abord présent aux USA, Street View précédera en 2008 tracé du tour de France pour offrir des vues inédites de la grande boucle. Couvrant aujourd’hui une trentaine de villes en France, le service en ligne de Google propose des cartographies 3D de quinze villes au Royaume-Uni. Son catalogue urbain s’orne de Rotterdam et Amsterdam en Hollande, ou encore de Turin, Naples et Gênes en Italie. Globalement, Street View a fait pour l’instant son apparition dans une trentaine de pays et la Belgique est déjà en boîte. L’entreprise est colossale : au sens littéral du terme, Google veut faire rentrer le monde réel dans le monde virtuel.

Voiture espion

Les Google Cars ne sortent que par beau temps. Lors de leur passage, les véhicules captent la présence des points d’accès sans fil. Elles mémorisent leurs coordonnées pour les intégrer dans les plans de Street View et de Google Maps et pour améliorer les services de géolocalisation des téléphones sous Androïd. Car avec le service Latidude de Google, vous pouvez être averti et voir si des amis sont proches de vous, dans la vraie vie, via leur portable. Par nature, ce fantastique reportage photographique urbain pose question quant au respect de la vie privée. En mai dernier, l’autorité européenne de protection des données, le groupe de travail Article 29, a contacté Google en ce sens, lui enjoignant de retirer d’initiative toute image de nature sensible et intime, et en lui demandant de prévenir la population avant le passage des véhicules que d’aucuns, allez savoir pourquoi, considèrent comme espion. Mais la bronca que provoque Street View a une autre source. La nouvelle viendra du site officiel de Google, suite à un contrôle des autorités germaniques. Alan Eustace, Senior Vice président recherche et ingénierie chez Google. " L’autorité de protection des données de la ville de Hambourg a demandé à réaliser un audit de l’un des véhicules utilisés pour la collecte des données dans le cadre de Google Maps pour Mobile. Cette injonction nous a conduits à examiner à nouveau les données collectées. Nous sommes arrivés à la conclusion que, contrairement à ce que nous avions affirmé précédemment, nous avons capté des données sensibles, non protégées par mot de passe. Le billet fera l’effet d’une bombe. En France, la CNIL va exiger que Google lui communique les informations techniques concernant la collecte de données WiFi, ainsi que des copies sur support informatique, en particulier une copie intégrale des données WiFi enregistrées en France.

Google plie

Google s’exécutera. " La CNIL ", peut-on lire sur son site, " est la première autorité de protection des données dans le monde à obtenir les données collectées par Google dans le cadre du dispositif Street View. (...) On peut d’ores et déjà constater que Google a bien enregistré des mots de passe d’accès à des boîtes mail, à l’insu des personnes. Google a enregistré des extraits de contenus de messages électroniques ".

Sur écoute

Le tollé est à l’ampleur de l’ambition de Google, mondial. En juin dernier, Richard Blumenthal, l’Attorney General du Connecticut a décidé de prendre la tête d’une enquête réunissant 30 états américains afin de déterminer quels types de données les Google Cars ont collectés lors de leur passage dans les villes. L’enquête veut également savoir si toutes les lois locales et fédérales ont été respectées. Et Blumenthal de qualifier Street View "d’invasion dans la vie privée profondément dérangeante".

En Allemagne, certains véhicules Google ont été caillassés. Face à cette pression, Google a décidé de postposer l’ouverture du service Street View dans ce pays jusqu’à ce que toutes les plaintes déposées par des citoyens allemands aient été traitées.

L’Autriche a banni temporairement la circulation des véhicules du service Street View sur son territoire.
A Londres, le Metropolitan Police Service a réagi à la plainte déposée par Privacy International. Selon l’ONG, Google a violé la loi dans la quasi totalité des trente pays où le système a été utilisé. L’audit montre que le système Google séparait intentionnellement les données cryptées et non cryptées et enregistrait systématiquement ces dernières. C’est comme mettre sur écoute un téléphone sans autorisation. " L’enquête menée à Londres a pour but de déterminer si les Google Cars qui ont sillonné l’Angleterre en 2008 ont collecté des données sensibles non protégées sciemment ou par erreur.

Au Canada, le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada a lui aussi décidé d’investiguer. (...)

Bête bug

Comment cela a-t-il bien pu se passer ? C’est toute la question : la démarche de Google était-elle intentionnelle ? Absolument pas clame le géant américain. Selon son PDG, Eric Schmidt, un informaticien s’est bêtement planté. (…) "Dès que nous nous sommes aperçus du problème, nous avons immobilisé nos voitures StreetView, isolé ces informations sur certains de nos réseaux que nous avons ensuite déconnectés pour les rendre inaccessibles. Nous voulons détruire ces données dès que possible, et sommes en train de consulter les autorités de régulation de divers pays sur la manière rapide de nous en débarrasser ".
Le mea culpa de Google s’accompagne de mesures de transparence et d’un audit indépendant sur les pratiques de Street View, qui devrait être rendu public.

Acte manqué

Alors, Google, coupable ou pas coupable ? Laissons les enquêtes suivre leur cours. Une chose est certaine. S’il ne s’agit pas d’un acte prémédité, on a affaire à l’acte manqué dans toute sa splendeur. Souriez, vous êtes tracé...

Jean-Luc MANISE