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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
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"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Pour consommer autrement
Une nouvelle éthique existentielle
Article mis en ligne le 20 décembre 2009
dernière modification le 22 décembre 2009

Rares sont ceux qui croient encore que la croissance capitaliste crée de l’emploi, qu’elle engendre le bien-être, et qu’elle permet l’égalité. Lentement mais sûrement, une nouvelle citoyenneté économique est en train d’émerger - sans grand soutien politique pour l’instant. Pourtant, il y a urgence. Le défi écologique nous oblige à produire moins dans beaucoup de domaines. Seule une mutation profonde de nos pratiques de consommation pourra impulser le changement.

A cet égard, pas mal d’initiatives liées à la simplicité volontaire ont récemment vu le jour. C’est très prometteur. Consommer moins ne veut pas dire abandonner toute production.

Nous avons besoin de nouvelles façons de fabriquer et de faire circuler les marchandises. Grâce à un soutien public aux coopératives et aux réseaux alternatifs de financement, on pourrait combiner la démocratie économique avec une dynamique de relocalisation : circuits courts, systèmes locaux d’échange, liens plus proches entre producteurs et acheteurs. Mais la transition vers ce modèle alternatif risque bien d’avorter s’il n’y a pas de soutien des revenus, et si on ne protège pas les acteurs les plus innovants contre la concurrence déloyale des entreprises capitalistes.

Donc, instaurons un statut officiel d’"acteur de transition économique" qui serait géré par les communes ou par les provinces, et qui inclurait un revenu de base conséquent, une pension légale et un accès à tous les soins de santé. Ce soutien public permettrait aux entrepreneurs sociaux les plus innovants et aux groupes de citoyens les plus créatifs de se déconnecter durablement de la logique financière dominante. De plus en plus de citoyens désirent une vraie "nouvelle économie". Aux économistes et aux décideurs de les accompagner dans cette profonde réorientation.

Demain, après le capitalisme

Une nouvelle éthique existentielle.

Christian Arnsperger. Économiste de l’Université de Louvain (UCL), il n’avait pas attendu le choc fatal de 2008 pour publier, avec un large succès, une "Critique de l’existence capitaliste : Pour une éthique existentielle de l’économie" (Éd. du Cerf, 2005).

Au carrefour de la philosophie et de l’anthropologie, de l’éthique et de la métaphysique, le Pr Arnsperger dispense une lecture complémentaire de cet ouvrage, prolongé en effet d’une "Éthique de l’existence post-capitaliste : Pour un militantisme existentiel". Un livre d’un entendement certes ardu, mais qui atteint dès les premières lignes au cœur même de l’esprit.

La thèse-clé de Christian Arnsperger se dévoile d’emblée : "L’après-capitalisme ne saurait être économique et politique sans être, en même temps, anthropologique". Car il en irait forcément d’une "réorientation de civilisation" qui passerait par un travail spirituel et politique de chacun de nous sur lui-même. Ce ne sont pas, insiste-t-il, les grandes idées qui manquent actuellement, mais bien "la volonté politique d’un changement anthropologique radical".

Il va de soi, le Pr Arnsperger n’entend pas ressusciter les vieux démons d’un collectivisme effondré à l’automne 1989, même s’il en demeure çà et là de vivantes métastases - l’on songe évidemment à la Chine. Il espère de préférence repenser une social-démocratie qui, sous la contrainte du capitalisme, aurait perdu son souffle prophétique depuis plus de trente ans.

Ce qu’il propose en définitive, c’est un libéralisme existentiel ancré dans la ligne d’une critique sociale chère à Ivan Illich par exemple, et dont les règles et institutions refuseraient la réponse capitaliste à nos angoisses de mort. Une nouvelle "culture contre-capitaliste" donc, qui ne renouerait en aucun cas avec les naïvetés des années 1970 et n’abolirait pas davantage "un principe de croissance [qui] ne saurait être mis en question".

"Quelque chose doit croître, toujours et sans cesse, si la mort doit être portée et traversée autrement que dans l’abattement nihiliste le plus absurde." S’il existe des consommations aliénantes, il s’en trouve aussi qui libèrent. Mais il faudra en réinventer les objets. C’est ici alors que Christian Arnsperger réexamine lucidement la triade du besoin, de l’envie et du Désir. En vue, il est vrai, d’une redistribution rigoureusement égalitaire.

Éric de Bellefroid
LLB, Mis en ligne le 30/11/2009. Voir l’article


Éthique de l’existence post-capitaliste. Pour un militantisme existentiel,
Christian Arnsperger Cerf, coll. "La nuit surveillée" 310 pp., env. 23 €