Extraits
Descendants des Palestiniens restés vivre dans l’Etat d’Israël après la guerre de 1948, les 2 millions de citoyens arabes d’Israël jouissent des mêmes droits que leurs concitoyens juifs. Ils élisent leurs représentants à la Knesset, et l’un d’eux, l’islamiste Mansour Abbas, devrait participer à la prochaine coalition - une première. Sur le plan économique, leur intégration s’accélère. Selon l’ONG Sikouy, vouée à la défense de cette minorité, les Arabes représentent un cinquième de la population, mais un tiers des élèves du Technion, l’équivalent de Polytechnique, à Haïfa. En dix ans, leur présence dans l’administration a été multipliée par deux. Certains affichent de spectaculaires réussites, comme George Deek, l’ambassadeur d’Israël en Azerbaïdjan. Arabe chrétien né à Jaffa, il a accusé le Hamas de vouloir "détruire Israël, en lançant des roquettes qui tuent aussi bien des juifs, des musulmans et des chrétiens".
En réalité, les émeutes posent plutôt la question de l’avenir de la Cisjordanie, territoire occupé depuis 1967, sur lequel Israël renforce son emprise. Pour s’en convaincre, il faut prendre la "route des tunnels", au sud de Jérusalem, qui mène au Goush Etzion, l’un des quatre grands blocs de colonies israéliennes. Afin de fluidifier une circulation de plus en plus dense, le gouvernement israélien a lancé des projets pharaoniques. Viaducs, tunnels, élargissement de la chaussée, les travaux s’étendent sur des dizaines de kilomètres. "L’extension du réseau routier israélien en Cisjordanie prépare l’annexion du territoire, affirme Yehuda Shaul, coauteur d’un rapport édifiant pour l’ONG israélienne Breaking the Silence. Ces nouvelles routes incitent les Israéliens à s’installer dans les colonies. Plus d’un demi-million y vivent déjà. Ils jouissent de tous les droits civiques, contrairement aux 2,5 millions de Palestiniens. Cela s’appelle un apartheid."
Stéphane Amar (Jérusalem)
Publié dans L’Express le 06/06/2021