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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
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"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Jean-François Noubel et l’intelligence collective
Sur internet, je vois de la compassion en ligne

Extraits d’un entretien avec Jean-François Noubel, paru dans "Nouvelles clés".

Article mis en ligne le 6 avril 2008
dernière modification le 28 mai 2008

À 42 ans, Jean-François Noubel a déjà vécu plusieurs vies. Cet ancien cascadeur et alpiniste a connu une bourlingue d’aventurier, avant de devenir coach d’un réseau d’entreprises américaines, représentatives du mouvement des Créatifs Culturels, concept inventé par son ami, le sociologue Paul Ray. Selon ce dernier, un quart des Occidentaux auraient déjà suffisamment muté pour dessiner l’épure d’une humanité nouvelle. Et Jean-François renchérit : « On pourrait même dire qu’il s’agit d’une humanité compassionnelle. Regardez bien : mieux que de l’information, le net véhicule de la sagesse ! »

Mutation

Au Moyen-âge, la connaissance ne pouvait pas être diffusée en masse - c’était techniquement impossible. Avec l’invention de l’imprimerie, première technologie de masse, un barrage a cédé et la connaissance, jusque-là enfermée dans des couvents et de petits cénacles, s’est brusquement répandue à tous. Je ne sais pas si vous avez déjà pu le constater, mais ce qui se répand aujourd’hui par internet, ce n’est pas seulement du savoir : c’est de la compassion ! Voilà ce que je crois : avec l’invention d’internet, un autre barrage cède et la sagesse à son tour, jusqu’ici enfermée dans des ashrams, des monastères et autres centres spirituels (où elle était transmise de génération en génération à travers une architecture sociale), se répand aujourd’hui dans tout le cyberespace et rend possible l’expérience compassionnelle de personne à personne à l’échelle planétaire. Ce n’est pas une expérience de transfert de contenu comme un livre. C’est une expérience relationnelle...

Bien sûr, si l’on en reste au paradigme présent et si l’on continue à regarder le monde avec les yeux du passé, il suffit d’extrapoler les courbes actuelles pour voir que l’aventure humaine se casse la figure très prochainement. Seulement, la conscience a plus d’un tour dans son sac ! Quand elle arrive à une impasse, elle peut être rapide, violente... et nous amener à un nouvel état du monde, à un niveau de réalité inimaginable jusque-là. Le poisson pouvait-il imaginer que la vie sortirait de l’eau ?

La mutation est vérifiable à l’échelle microcosmique de l’existence individuelle. Quand un grand accident nous arrive et que nous nous heurtons à une « fin du monde » - parfois littérale, on peut être en phase finale d’une maladie, ou dans une grave dépression et avoir envie de se tuer -, que se passe-t-il ? Parfois c’est vraiment la fin. Mais d’autres fois, on se retrouve soudain intégré à un nouveau niveau de réalité, d’où, regardant rétrospectivement le passé, on se dira qu’on a transcendé la réalité de façon inimaginable. Une réalité de niveau supérieur a émergé. C’est ce qui me semble être en train de se produire aujourd’hui dans l’humanité. Cela va-t-il réussir ? Je n’en sais rien. Mais le phénomène est en marche, je le constate.

Ce qui se passe aujourd’hui

Deux axes m’intéressent. Le premier consiste à observer comment la société se réorganise, ici et là, pour dépasser les limites des écosystèmes sociaux existants, poussée par une intelligence collective prodigieuse. Le second revient à regarder ce qui se passe dans ma propre conscience, dans la méditation - ce qui est évidemment plus difficile à partager, excepté avec des gens qui font la même expérience et avec lesquels j’ai parfois la chance de pouvoir travailler.
Sur le premier axe, l’essentiel est que l’on trouve aujourd’hui une forme sociale qui n’existait pas il y a quinze ans et n’avait jamais existé avant : la société civile s’est accaparé le cyberespace (internet, blogosphère, wikisphère, etc), utilisant avec maestria des outils hyperpuissants qui permettent de gérer la complexité, de faire du brainstorm collectif, de résoudre des conflits, de lancer des projets, de tisser des liens simultanés, d’échanger des savoirs, de construire une mémoire collective... bref, de dépasser tout ce qui jusqu’ici rendait l’autogestion impossible et reléguait les nouvelles utopies aux calendes grecques. Jusque-là la complexité était telle, qu’on était toujours obligé d’en revenir à l’écosystème social du vieux monde, composé à 99% d’organisations à structure pyramidale, fonctionnant sur la division du travail (et donc de l’information), sur l’autorité hiérarchique et sur la rareté. Ce vieux système a montré ses limites. Et que voit-on ? Poussée à ses limites extrêmes, la logique du vivant s’invente de nouvelles formes. Personne ne l’a prémédité. Elles émergent. C’est tout nouveau, ça n’a que quelques années et ça réunit déjà, de par le monde, des centaines de millions de personnes, qui échangent des savoirs, coordonnent des projets, partagent des visions, montent des choses ensemble...

En France, aujourd’hui

La véritable force politique en France, aujourd’hui, n’est pas dans les institutions, mais dans toute cette jeunesse, qui participe notamment au monde du logiciel libre. Le logiciel libre est un principe économique beaucoup plus puissant que l’économie de la rareté que nous avons connue jusqu’à présent. Il est riche d’un énorme activisme social. Derrière ces nouvelles technologies, ces wiki, ces blogs et tout ce qui est en train d’émerger, se profile tout un projet de société. Le réseau régule les espaces collectifs avec l’ensemble des possibilités et l’ensemble des interdictions. Et cet espace collectif, chacun peut se l’accaparer et le faire évoluer, puisqu’il est dans le domaine du libre. Quant à l’organisation pyramidale, contrôlée par une minorité, elle est désormais en pleine panique, tant la complexité du monde la dépasse. C’est pourquoi les grandes organisations sont si paumées...
Je pense que voyons à l’œuvre une sorte de darwinisme social, au sens positif du terme.

Le darwinisme, c’est : création puis sélection - il ne faut jamais oublier qu’avant la sélection, il y a création. Or, ça, c’est quelque chose qu’avec des yeux classiques, on ne peut pas voir. Les yeux de l’économie de masse et du « un vers tous » ne peuvent ni voir ni comprendre le modèle de l’économie distribuée : le « tous vers tous ». Ils n’ont pas les outils. Ils ne savent rapporter que l’exception et la rareté, et restent donc dans leurs impasses. Quand c’est l’échange de connaissance qui devient locomotive, il n’y a plus rareté. En très bref, la sagesse est distribuée partout, comme l’énergie ! Tel est le nouveau paradigme, qui transcende et inclut les seuils de tous les modèles précédents. Avec mon ami Paul Ray, l’inventeur du concept de Créatifs Culturels, nous travaillons sur l’émergence de la « wisdom society », où la sagesse est quelque chose qui transcende et inclut le mental. Ce qui nous amène à un nouvel espace, qui, lui aussi, trouvera ses limites et ses problèmes, mais ces problèmes ne seront plus du tout de même nature que ceux que nous connaissons aujourd’hui.

Pour lire l’entretien complet : http://www.nouvellescles.com/article.php3?id_article=48

Vous pouvez retrouver Jean-François Noubel sur www.thetransitioner.org et sur www.angenius.org

Le site "thetransitionner.org" en français de Jean-François Noubel est absolument passionnant. Il ouvre des tas de portes et de nouvelles perspectives... On y passerait des heures. Pratiquement un nouveau mode de vie, de penser, de travailler... A voir absolument !