Des champignons pour isoler les maisons ?
08-08-2022 - Mis à jour le 22-08-2022
D’après un reportage de Valentine Van Vyve
Quand des matériaux en champignons remplacent le plastique : du champost à l’ecodesign
En se développant, les pleurotes transforment le marc de café en un terreau naturel, le champost. Si celui-ci est déjà valorisé tel quel par la ferme Nos Pilifs, il est aussi un résidu à haut potentiel : “En le donnant ‘à manger’ à un mycélium, il peut être utilisé pour créer un nouveau matériau biodégradable”, explique M. Jacquet. En grandissant dans un moule réutilisable, ce mycélium prend la forme qu’on souhaite lui donner.
Durable, fonctionnel… et moins cher ?
"À l’échelle mondiale, 52 % des plastiques – qui pour rappel, sont produits à base d’énergie fossile – sont consommés par les secteurs de la construction et de l’emballage" alors que "78 % de la production mondiale finit sa course dans la nature", pointe-t-il. PermaFungi pense avoir trouvé une solution pour lutter contre ce désastre environnemental. "Moulés en panneaux isolants ou en protection d’emballage, les myco-matériaux sont capables de remplacer le plastique", avance le CEO. Ses propriétés sont en effet intéressantes à plus d’un titre : "C’est un bon isolant acoustique et thermique, il présente une résistance à l’eau plus ou moins égale à la norme actuelle. Du point de vue de l’inflammabilité, comme le plastique ou le bois, il n’est pas bon, mais il présente l’avantage de ne pas dégager de fumées toxiques en brûlant. Enfin, il est 100 % biodégradable", détaille notre interlocuteur.
"Ca n’est pas tout d’être plus durable et plus fonctionnel. Encore faut-il être moins cher". Raison pour laquelle "d’ici trois à cinq ans, l’objectif est de coûter moins cher que le plastique".
L’entreprise bruxelloise PermaFungi entend ainsi devenir leader dans la production de myco-matériaux en Europe et "le premier au monde à le faire de manière totalement circulaire". Les acteurs du secteur italiens, britanniques et nord américains, se comptent actuellement sur les doigts d’une seule main.
Un vent favorable souffle sur l’économie circulaire
Un groupement économique est en train de se développer autour de l’économie circulaire et de l’agriculture urbaine à Bruxelles.
Les architectes de Bento et de Natura Mater travaillent avec nous et promeuvent les myco-matériaux ; l’agence immobilière Nextensa nous accueille dans les caves ; Ekxi et Le pain quotidien nous fournissent en marc de café. Il y a donc tout un écosystème davantage tourné vers l’économie de demain qui se met en place pour produire une économie moins dépendante des énergies fossiles.”
La Région, par le biais de son ministre de la Transition climatique Alain Maron et de la Secrétaire d’État à la Transition économique Barbara Trachte, applique le modèle, développé par l’économiste Kate Raworth – dit du Donut – qui prend en compte le plafond des limites environnementales et le plancher des droits sociaux fondamentaux. " La Région entend valoriser les projets suscitant des externalités fortes : création d’emplois, impact favorable sur le développement économique et sur l’environnement…
"Utilisant 40 % de notre énergie et générant 36 % de nos émissions de gaz à effet de serre, les bâtiments sont le premier consommateur d’énergie en Europe", illustrait, en décembre dernier, la commissaire à l’Energie, Kadri Simson. Un accent fort doit dès lors être mis sur la rénovation, ciblant en premier lieu les 15 % des bâtiments les moins performants. "Cela impliquerait la rénovation – et l’isolation – de plus de 35 millions de bâtiments d’ici la fin de cette décennie.“
Valentine Van Vyve
Journaliste pour la rubrique Planète - Inspire de La Libre, Publié le 08-08-2022
Voir le pdf dans mes peartrees.
Dire adieu au goudron en ville.
7 septembre 2022
Comment ? En dépavant ! L’idée derrière ce projet canadien
on remplace le goudron par des plantes
Sur la période 2021-2023, Sous les pavés prévoit la déminéralisation de dix-huit lieux, dans neuf régions du Québec. Trois villes pilotes vont aussi intégrer le projet dans leur communauté. Au-delà du goudron retiré, des degrés en moins et de la verdure en plus, Audrée Boudreau explique que ces expériences de dépavage ont créé des liens durables dans la communauté. « Tout le monde a quelque chose à faire, qu’on soit un adulte ou un enfant. On se sent forts, utiles ! On a le sentiment de changer les choses quand on dit bye-bye à l’asphalte. »
Par Alexis Gacon
Reporterre
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« La sobriété et le rationnement sont de puissants outils de justice sociale »
8 septembre 2022
Pendant longtemps, la sobriété a essentiellement été discutée dans les milieux écologistes ou parmi les spécialistes de l’énergie. Le gouvernement et les grandes institutions préféraient largement mettre l’accent sur les renouvelables ou l’efficacité énergétique, au lieu de se risquer à avancer sur le terrain délicat et conflictuel d’une sobriété impliquant la révision à la baisse des besoins et la réduction du confort énergétique.
• Parler de rationnement temporaire juste pour passer l’hiver, c’est une manière de parler de la finitude des ressources, mais sans rien changer des causes qui nous mènent à cette situation ?
C’est dépolitiser les choses, traiter l’évènement comme s’il nous tombait dessus sans que l’on ait pu le prévoir, comme un coup du sort. Pourtant cela fait plusieurs décennies qu’il y a de nombreuses alertes sur la dépendance aux fossiles et tous les problèmes qu’elle pose : diplomatiques, climatiques… La situation va perdurer si l’on ne discute pas de réduction de long terme, de répartition des efforts et de justice sociale. Et pas seulement pour protéger les plus faibles, mais aussi pour faire peser les efforts d’abord sur les plus gros consommateurs.
• Pourquoi les politiques n’arrivent-ils pas à anticiper ?
Tant que des voix vous disent qu’on pourra s’en sortir sans trop de casse, en misant sur ceci ou cela, cela compose un paysage de messages contradictoires qui permet de se rassurer. Dans le doute, on préfère faire confiance au message qui nous fait le plus plaisir. Les lobbys savent très bien utiliser cela.
On a tellement misé sur la société d’abondance et de consommation que c’est douloureux aujourd’hui d’y renoncer. Or la question aujourd’hui n’est plus comment partager les fruits de l’abondance, mais comment répartir les efforts de sobriété.
Par Laury-Anne Cholez
Le tout bio « impossible » sans préparation
7 eptembre 2022
Fin avril 2021, Gotabaya Rajapaksa, alors président [1], a en effet décidé d’opérer un virage inédit : faire du Sri Lanka le premier pays au monde à pratiquer une agriculture 100 % biologique. L’objectif derrière cette fausse décision écolo : économiser des devises étrangères en n’important plus d’engrais et pesticides chimiques, produits creusant alors la dette du pays. Ceux-ci ont donc été définitivement interdits.
Du jour au lendemain, les agriculteurs, qui représentent 28 % des actifs de ce pays de 22 millions d’habitants, ont été obligés de se passer d’eux. Sans même savoir comment se convertir au bio. Résultat : la production a chuté de près de 20 % dès les premiers mois.
En octobre 2021, le tout bio a été arrêté, et les engrais chimiques ont fait leur retour. Mais pour les agriculteurs, le mal était fait.
Sans être formés au tout bio, de nombreux agriculteurs se sont retrouvés avec des terres sur lesquelles plus rien ne poussait.
Les avertissements ont pourtant été nombreux. Avant cette décision du tout bio, des universitaires sri-lankais prévoyaient déjà une baisse des rendements de 50 %, et des conditions de vie dégradées pour les agriculteurs. "Sans s’appuyer sur des preuves scientifiques concrètes, et en appliquant cette réforme dans des temporalités trop courtes, l’agriculture biologique va droit dans le mur", affirmait ainsi Buddhi Marambe en octobre 2021, un des quelques universitaires consultés sur la réforme en cours par le ministère de l’Agriculture. Une critique qui lui a valu d’être renvoyé de ce comité d’experts.
"Un passage au bio graduel et étalé dans le temps"
"Le passage à l’agriculture biologique est bienvenu par beaucoup d’agriculteurs",
Ils espèrent réussir cette transition, pour une question de santé : les engrais chimiques ont abîmé la santé de nombre d’entre eux.
Le biologique présente des avantages certains pour la santé des agriculteurs. » Comme d’autres experts, pour réussir le bio, elle préconisait « un passage au bio graduel et étalé dans le temps ».
Foot et jets privés : « Avec un fou rire, Mbappé fait bouger les choses malgré lui »
Finalement, ce buzz médiatique est-il une bonne chose ? Peut-on espérer voir le sport de haut niveau devenir plus exemplaire en matière d’écologie ?
La bonne nouvelle c’est que ça choque, il y a un malaise. Mbappé et Galtier qui se sont marrés devant la question du journaliste, cela fait penser à une scène du film Don’t Look Up : sur un plateau télé, un scientifique parle de la fin du monde et tout le monde rigole autour de lui.
La polémique autour de Mbappé et Galtier peut-elle mettre en lumière le bilan carbone catastrophique de cette Coupe du monde ?
Alors qu’on déplore depuis plusieurs années les morts d’ouvriers sur les chantiers des stades au Qatar, c’est Mbappé qui, avec un fou rire, fait bouger les choses malgré lui. On est plus ému par ce que dit Mbappé que par les morts dans les stades au Qatar. Cet écho médiatique autour d’une petite phrase, c’est un peu étonnant, et en même temps c’est un bon signal.
Reporterre, Camille Belsoeur
https://reporterre.net/Foot-et-jets-prives-Mbappe-fait-bouger-les-choses-malgre-lui?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_hebdoReporterre, Camille Belsoeur https://reporterre.net/Foot-et-jets-prives-Mbappe-fait-bouger-les-choses-malgre-lui?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_hebdo]
Mode responsable. Comment peut-on faire pour être au courant de ce qu’on porte ?
3 juillet 2022
Catherine Dauriac est présidente de Fashion Revolution France. Cette association, qui regroupe 96 pays, cherche à faire bouger les lignes en matière de conso de la mode. L’une des industries les plus polluantes au monde.
Tout le monde s’habille chaque matin, peut-être le moment est-il venu de regarder l’étiquette du vêtement que l’on porte…
Et, si acheter c’est exister, on comprend que tout le monde ait envie de passer par cet acte.
Vous dites aussi que le coton tue. Comment ?
C’est très radical, mais il tue depuis longtemps. Avec la traite des Africains pour sa culture, le coton a tué littéralement les hommes qui le cultivaient, et ceux qui le cultivent encore. On pense à l’épandage des pesticides, car c’est une plante très fragile. Le coton tue les écosystèmes quand on rejette les teintures dans les cours d’eau, ce qui entraîne une perte de la biodiversité, des famines et des toxicités pour les familles qui vivent autour de ces cours d’eau.
Le coton épuise les travailleuses qui commencent à travailler dans les filatures à 12 ans, et qui sont exténuées physiquement à 25 ans. En bout de ligne, le coton tue les consommateurs qui portent des vêtements toxiques, comportant du cyanure, du cadmium.
Peut-on savoir ce qui va nous arriver si on porte ceci ou cela ? Y a-t-il une loi qui oblige à faire ce genre d’affichage des produits contenus dans le textile ?
On parle ici des perturbateurs endocriniens, ces produits chimiques contenus dans la teinture ou liés au blanchiment de certaines matières et qui provoquent des dérèglements physiologiques. L’an dernier, une loi est passée en Californie qui propose de noter la composition et la toxicité du vêtement. En France, nous n’avons pas cette loi, en Belgique non plus. La seule chose qui soit affichée, de manière obligatoire, c’est le pays de fabrication, la composition du tissu. La réglementation internationale actuelle ne liste pas les produits toxiques contenus dans les vêtements. On a besoin de régulation. C’est notre travail au sein de Fashion Revolution : pousser les politiques à prendre leurs responsabilités, car, pour le coup, ils sont responsables.
(...) Le polyester, c’est du pétrole 100 %, et il y a aussi les matières comme les viscoses plus ou moins ‘responsables’. Plus de 70 % des vêtements qu’on produit sont à base de produits chimiques. On espère que les fibres naturelles vont reprendre de la valeur, on pense à la filière laine qui représentait 10 % des textiles il y a quelques années, aujourd’hui ce n’est plus que 1 %. Quant au lin, il représente 0,4 % des fibres mondiales. Si on achète une chemise en lin, plutôt qu’une chemise en coton, on économise des litres d’eau. Cette chemise est inusable, et produite dans de bonnes conditions. Pourquoi pas cette chemise plutôt que quatre T-Shirt ?
(...) La différence entre le salaire minimum et le salaire vital au Bangladesh est énorme : le salaire minimum payé à un travailleur du textile est de 85 euros par mois.Source Statista, NdlR), et il faut 200 à 300 euros pour le minimum vital.
La différence entre le salaire minimum et le salaire vital au Bangladesh est énorme : le salaire minimum payé à un travailleur du textile est de 85 euros par mois.Source Statista, NdlR), et il faut 200 à 300 euros pour le minimum vital.
“Fashion, Fake or Not”, aux éditions Tana, 14€
Le coton – pas bio – en prend pour son grade… On lui doit la disparition de la Mer d’Aral, à l’époque où l’URSS a voulu transformer l’Ouzbékistan en gigantesque de champ de coton. Les rivières détournées ont asséché la mer, et il ne reste que le sel sur le sol, devenu infertile. L’auteure de Textiles éthiques rappelle aussi que des grandes marques de mode participent à l’exploitation du peuple ouïghour en Chine. Sont pointés du doigt Zara, H&M, mais aussi Calvin Klein et Ralph Lauren. “Une situation qui gangrène l’industrie textile et organise l’esclavage moderne au profit de la mode”. Le constat du bouquin oblige à un nouveau positionnement en tant que consommateur. Textiles éthiques – s’habiller, un acte engagé”, Émilie Pouillot-Ferrand, chez Champs d’action, 10 euros.
"Le monde ne nous parle plus"
Recension du livre "Réparer l’eau" d’Olivier Rey, publié aux Éditions Stock, 2021)
6 mai 2022
"Et tout comme le miroir change avec la couleur de son objet, [l’eau] se modifie selon le site où elle passe : salubre, nuisible, laxative, astringente, sulfureuse, salée, incarnadine, sinistre, rageuse, coléreuse, rouge, jaune, verte, noire, bleue, graisseuse, grasse, subtile. Parfois, elle déchaîne des conflagrations et parfois elle les éteint ; elle est chaude et elle est froide ; elle emporte ou dépose, creuse ou élève, arrache ou édifie, comble ou vide, monte ou s’enfonce, rapide ou calme, parfois dispensatrice de vie ou cause de mort, d’accroissement ou de privation ; tantôt elle nourrit et tantôt elle fait le contraire : tantôt elle a une saveur de sel, tantôt elle est insipide, tantôt ses grandes crues submergent les vastes vallées. Tout change avec le temps."
Ces quelques lignes sont de Léonard de Vinci.
La science telle qu’il la concevait procédait non d’un impérialisme de la raison, mais d’une admiration permanente et sans limites [du réel] ; elle était fondée non sur l’expérimentation, mais sur une contemplation attentive, et s’accomplissait dans le dessin et la peinture, qui, s’efforçant de saisir et de reproduire le monde dans son infinie variété, permettaient de mieux le voir."
Bref, si Léonard était un scientifique, il l’était "en un temps où ’artistes’ et ’ingénieurs’ étaient artisans ayant affaire à la nature en général, [et où] rien ne s’opposait à ce que les deux figures fussent réunies en une seule personne”.
Voici ce que nous aurions perdu aujourd’hui, regrette Olivier Rey, exemples à l’appui, dans son ouvrage Réparer l’eau.
"Dans un pays dit développé, l’eau est moins ce qui tombe du ciel, ou ce qui coule à la rivière, que ce qui circule dans les tuyauteries et se commande au robinet." Malheureusement, ce discours "gestionnaire et managérial" nous fait courir "un grave danger", insiste le mathématicien. Il est "si rabougrissant, si ignorant du monde, sous ses affectations de sérieux que, après son passage, la pensée laminée a autant de peine à recouvrer l’ensemble de ses facultés que l’herbe écrasée à repousser après le passage de l’armée d’Attila".
Le secours serait dans la poésie, bien qu’Olivier Rey se méfie de ce terme ambigu. Non pas celle qui "ouate" le monde, plutôt celle de Francis Ponge, qui cherche à faire surgir le réel dans "son étrangeté foncière, sa sauvagerie, ses dangers et ses risques" ; qui lui accorde tant d’attention, cherche à la décrire dans un style si inédit, que l’homme parvient à véritablement progresser, "non seulement par les pensées, mais par les facultés, les sentiments, les sensations [et] la quantité de ses qualités”.
« La sobriété est notre plus grande richesse »
le 7 septembre 2022
Propos recueillis par Eric Aeschimann et Rémi Noyon
L’économiste Eloi Laurent. (ÉRIC GARAULT/PASCO)
Peut-on être sobre sans s’appauvrir ? Oui, répond l’économiste Eloi Laurent. Selon lui, c’est la croissance qui nous coûte cher, avec des effets nocifs sur la santé, le bien-être et la planète.
Chercheur à l’Observatoire français des Conjonctures économiques (OFCE), l’économiste Eloi Laurent dénonce depuis des années « l’obsession de la croissance » des gouvernements. Enseignant à Sciences-Po, Ponts-Paris Tech et Stanford University, il est également l’auteur de plusieurs ouvrages grand public, dont le dernier en date, « la Raison économique et ses monstres », est sorti au printemps aux éditions Les Liens qui libèrent. En 2019, dans « Sortir de la croissance », il estimait que la croissance est « aveugle au bien-être humain, sourde à la souffrance sociale et muette sur l’état de la planète ». Les débats en cours sur la sobriété semblent lui donner raison.
La sobriété, c’est quoi concrètement ?
Cela pourrait être une définition de l’économie, celle des origines : la satisfaction de besoins raisonnés au moyen de ressources limitées. Pour Aristote ou Xénophon, les fondateurs de l’analyse économique au IVe siècle avant notre ère, penser comme un économiste, c’est être économe de ses désirs comme de ses ressources.
Viande et boissons : pourquoi le régime alimentaire des hommes pollue davantage
D’après une étude britannique, en consommant plus de viande et plus de boissons, les hommes émettent en moyenne 41 % de gaz à effet de serre de plus que les femmes. Un régime alimentaire sous-tendu par des constructions sociales genrées.
Le sujet d’une alimentation différenciée en fonction du genre est largement documenté. (...)
Selon une enquête de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), datée de 2017, la consommation médiane des hommes se situe à 43 grammes par jour de viande hors volaille contre seulement 27 grammes par jour pour les femmes.
41 % de pollution en plus
« Nous mangeons trop de manière générale, souligne Carine Barbier, chercheuse au Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (Cired). Les hommes mangent 15 % de plus que les femmes. »
Et leur régime alimentaire pollue davantage que celui des femmes, notamment à cause de cette consommation disproportionnée de bidoche.
Les résultats d’une étude britannique, menée par des chercheurs de l’université de Leeds et publiée dans le journal « Plos One » en novembre 2021, sont sans appel : avec un régime plus carné et une plus grande consommation de boissons, les hommes polluent plus que leurs homologues
féminines.
Les scientifiques ont analysé le régime alimentaire de 212 Britanniques adultes. Ces derniers ont enregistré leur consommation de nourriture et de boissons sur trois périodes de vingt-quatre heures. Les chercheurs ont également calculé les émissions de gaz à effet de serre nécessaires à la production de chacun des aliments mentionnés par les participants.
J’ai envie d’un tartare dans un restaurant : suis-je une « viandarde » ?
Conclusion : 31 % des émissions polluantes alimentaires sont imputables à la viande, 15 % aux boissons, 14 % aux produits laitiers et 8 % aux gâteaux, confiseries et biscuits. Les régimes non végétariens sont 59 % plus émetteurs de gaz polluants que les régimes végétariens. Et le régime des hommes émet globalement 41 % de plus de gaz à effet de serre que celui des femmes.
Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, il est important, d’après les scientifiques de l’université de Leeds, de réduire notre consommation de viande, en particulier de viande rouge. Selon la FAO
L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), la production de viande est responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. « L’élevage de bétail est responsable d’une grande partie de la déforestation, détaille Carine Barbier. Pendant leur digestion, les bovins émettent du méthane, un gaz à effet de serre avec un pouvoir de réchauffement 25 fois plus puissant que celui du CO2. » L’élevage est par ailleurs très gourmand en céréales : près de 40 % des céréales produites et récoltées dans le monde servent directement à nourrir le bétail.
Le végétarisme, un régime alimentaire dévirilisant ?
L’alimentation reste "structurée par des représentations". La viande, "symbole par excellence de l’agression, de la force, du pouvoir", est fortement reliée à la masculinité.
“Cette symbolique est renforcée par le principe d’incorporation : en consommant le muscle d’un animal fort, on incorpore sa force.” (...)
"Une femme qui mange des légumes, ça paraît normal. C’est plus difficile socialement pour un homme d’annoncer renoncer à la viande. C’est encore mal compris", souligne Lucie Wiart. Notamment parce que le végétarisme est très lié aux questions d’écologie et de bien-être animal, des causes associées à l’émotivité, à la compassion envers les animaux, et ainsi à la féminité.
Pour inciter les hommes à réduire cette consommation excessive de viande, la chercheuse estime que la solution « la plus rapide » consiste à miser sur l’éducation : il est pour elle nécessaire d’apprendre, de manière chiffrée et précise, l’impact de la consommation carnée sur l’environnement, la biodiversité et le changement climatique.
“Nous devons aussi revoir notre relation au vivant et apprendre aux garçons que manger de la viande n’est pas ce qui les rend viril.”
Car, comme notre façon de manger n’est pas innée, elle peut être déconstruite.
Aurélien Barreau au sein du Medef
1. La vidéo d’Aurélien Barreau au Medef :
https://youtu.be/HU0w4A0D9G4
2. Extrait de la vidéo :
Extrait d’une prise de parole percutante
Alors que faire ?
Evidemment écouter les grands chefs d’entreprise, les ministres ici présents, s’inspirer de leurs discours dont je ne nie rien de la cohérence logique ou de la probité morale, mais peut-être envisager à titre d’hypothèse qu’ils ratent l’essentiel pour trois raisons fondamentales :
– la première c’est que ce qui est fait concernant le réchauffement climatique, on le sait très bien, est dérisoire ;
– la seconde qui est plus grave encore et qui est moins bien comprise, c’est que le réchauffement climatique lui-même est dans une certaine mesure dérisoire par rapport à l’étendue de la crise systémique et plurifactorielle que nous traversons : pollution, acidification des océans, interruption des cycles bio-géo-chimiques, dévastation des espaces naturels, n’ont, pour l’essentiel, rien à voir avec le climat mais tuent davantage que ce dernier. Ce qui signifie que chacun des piliers sur lesquels repose la bio-stabilité de cette planète est en train de céder ;
– et mon troisième point est peut être plus grave encore, consiste à remarquer que quand bien même nous prendrions à bras le corps la lutte contre chacun des items que je viens de mentionner, ce qui n’est pas du tout le cas en pratique, nous demeurerions vraisemblablement toujours dans le dérisoire parce que le véritable problème c’est qu’aujourd’hui notre rapport au monde, notre être à l’espace, fait de l’éradication systématique du vivant une finalité.
Alors bien sûr, parce que nous sommes ici des gens sympathiques et éduqués, on se demande en gros comment faire des bombes issues du commerce équitable et utilisant des matériaux biologiques : c’est mignon, pourrait-on dire, mais tant que le pilonnage en règle de la biosphère demeure le geste cardinal, croyez-moi, l’origine des projectiles n’a pas beaucoup d’importance. Alors soyons explicite : je crois qu’il est aujourd’hui indispensable de penser un peu hors de l’ordre, même au sein du Medef.
Aurélien Barreau