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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
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"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Henri Goldman : Bruxelles, antidote des obsessions zemmouriennes
Article mis en ligne le 28 octobre 2021

24 octobre 2021. A la fin des Assises bruxelloises de lutte contre le racisme, Henri Goldman republie sur son blog ("Le blog cosmopolite") un article paru dans La Libre en 2010, qui "tient le coup", écrit-il.

La citation qui suit date d’aujourd’hui (24 octobre 2021).

Je la fais suivre de quelques extraits de l’article de 2010, toujours éclairants, à la fois devant les affrontements français actuels qui préludent la campagne des élections présidentielles, et devant les problématiques en jeu à Bruxelles pour le moment : port du voile, laïcité, abattage rituel...

"Bruxelles peut se profiler comme antidote vécu des obsessions zemmouriennes : une ville où seulement 22,5% des habitants ont deux parents belges de naissance, où la majorité des élèves suivent le cours de religion musulmane et où Mohammed et Sarah sont les prénoms les plus portés par les jeunes de moins de 18 ans. Et pourtant, une ville où l’extrême droite n’a jamais réussi à percer et où aucune obsession identitaire, qu’elle soit blanche ou basanée, n’a réussi à empêcher, sur le terrain, la construction patiente d’une citoyenneté bruxelloise partagée qui a intégré la diversité culturelle et qui la respecte."

(Henri Goldman, 24 octobre 2021)


Entre 1965 et 1973, la Belgique a littéralement importé des dizaines de milliers de travailleurs marocains et turcs – donc musulmans –, avec leurs familles. Le travail, qui leur donna une place dans la société, a constitué un extraordinaire creuset de ce qu’on n’appelait pas encore l’interculturalité. La crise économique qui s’ensuivit amena le chômage de masse, la précarisation des conditions de vie avec, pour conséquence, le repli des communautés immigrées sur leurs réseaux d’entraide et leur reconcentration territoriale. Puis une nouvelle génération est apparue. Malgré toutes les difficultés rencontrées, une partie d’entre elle s’est instruite, a appris à maîtriser les codes de la société belge, est plus à l’aise en français qu’en arabe ou en turc et aspire naturellement à prendre sa place au sein des élites de son pays. Elle aussi s’est heurtée au plafond de verre de la discrimination. Alors, puisque l’émancipation individuelle lui est interdite, elle s’est redécouverte musulmane pour pouvoir s’appuyer sur une identité collective.

Pourtant, cette nouvelle affirmation d’un islam visible n’est pas la cause principale des nouvelles tensions interculturelles. Une société saine et sûre d’elle-même n’aurait jamais été déstabilisée par un phénomène tout à fait pacifique. Mais c’est désormais la société majoritaire qui est aux prises avec l’angoisse identitaire. Terminée la belle assurance occidentale d’être dans le sens de l’histoire et à l’avant-garde de l’humanité. La peur qui nous étreint désormais face à un monde dont nous ne sommes plus le centre nous fait serrer les rangs autour de notre propre patrimoine culturel et émotionnel. Pour certains, c’est l’identité chrétienne, pour d’autres – et ce sont parfois les mêmes –, c’est une conception particulièrement crispée de la laïcité. 

(...)

en 2030, au train où vont les choses, ce ne seront pas seulement les musulmans qui seront majoritaires à Bruxelles. Ce seront aussi les pauvres et les exclus du travail, les descendants d’une immigration qui est mal accueillie, les jeunes sans perspective d’insertion, les élèves d’un enseignement impuissant, les ménages en quête d’un logement sain, bref, tous les laissés pour compte d’un État social malade. C’est vrai, la plupart d’entre eux seront aussi musulmans. Mais est-ce vraiment par ce petit bout de la lorgnette qu’il faut appréhender les tensions sociales urbaines ?
Bien sûr, la démarche interculturelle reste indispensable. Il faudra trouver des formules équilibrées qui puissent à la fois apaiser les craintes de la société majoritaire et répondre à des aspirations profondes à la reconnaissance de la part des populations discriminées qui ont besoin de retrouver confiance dans un État qui est aussi le leur. Mais cette ville n’aura un avenir que si des solidarités transversales arrivent à se nouer de manière inclusive. Définitivement, les musulmans font partie de nous.