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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
Slogan du site

"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

"Sagesse des peuples premiers" et Pierre Rabhi
Un numéro de la revue "Terre et Humanisme" consacré aux Peuples autochtones
Article mis en ligne le 5 octobre 2007

"Seulement après que le dernier arbre aura été coupé, seulement après que la dernière rivière aura été empoisonnée, seulement après que le dernier poisson aura été pêché ; alors nous comprendrons que l’argent ne peut pas être mangé."

Cette prophétie amérindienne met en évidence avec une simplicité implacable l’état d’esprit qui aura dominé le monde contemporain. Nous disons qui aura dominé, car nous souhaitons de toute notre ferveur, qu’en dépit d’un héritage désastreux, les générations à venir assagies pourront surmonter les difficultés qui les attendent. Ainsi pourront-elles avoir un regard rétrospectif sur une civilisation où arrogance et aveuglement auront atteint le summum.

(Début de l’article "Sagesse des peuples premiers" écrit par Pierre Rabhi
et paru dans le dernier numéro des Nouvelles de Terre et Humanisme – oct – nov- déc 2006)

Terre et Humanisme est une association créée autour des activités de Pierre Rabhi.

L’association Terre & Humanisme est crée en 1997-98 "pour la transmission de l’éthique et de la pratique agroécologique" initiée par Pierre Rabhi et s’installe au Mas de Beaulieu en Ardèche qui devient une base logistique des activités et un lieu de démonstration, d’expérimentation et de formation. Cette année-là aussi, lancement de nouvelles actions de développement au Niger (région d’Agadez), au Mali (région de Gao) et au Maroc (Kermet BenSalem, Dar Bouaza, Taroudant)

En 2006, parait un numéro spécial dont voici un extrait de l’éditorial (de Pierre Mante) :

Edito : Devoir d’harmonie...

Bushmans, Maasaïs, indiens Kogis ... Ils ont connu l’exclusion, la persécution, ont vu leurs terres confisquées, violées, profanées ; tous ont été victimes d’une modernité conquérante qui ne laisse aucune place à l’Autre, de l’arrogance de celui qui croit savoir et impose sa vision du monde à plus sage que lui.
Mais ils ont gardé cette conscience d’être reliés à la terre, de lui appartenir ; ils ressentent qu’en prélevant de manière inconsidérée le gaz ou le pétrole on prive notre terre de force et d’énergie et savent que "si leur relation à elle n’est pas juste, l’injustice et le déséquilibre risque alors de pénétrer leur univers". C’est pourquoi ils ont un devoir d’harmonie.
Comment ne pas penser aussi aux paysans sans terre ou ruinés par l’agriculture industrielle en Afrique, en Inde, en Chine [1] et à présent à nos portes en Europe de l’Est, aux victimes de guerres ou de désastres écologiques engendrés par l’homme : centaines de millions d’êtres humains déracinés, poussés au désespoir et alimentant des bidonvilles ?
L’histoire est une succession de violences faites aux hommes, d’appropriation et de confiscation. C’est cette même logique qui prévaut aujourd’hui avec les tentatives d’appropriation de nos biens communs, eau, semences ... etc. qui atteint aujourd’hui en France l’impensable avec l’offensive menée contre les produits phytosanitaires et les engrais naturels !
Oui, la vigilance, la détermination et le courage sont de mise.
Alors puisons dans cette sagesse venue du fond des âges de quoi nous inspirer pour grandir en autonomie et en humanité .

Dans le même numéro, un article de Pierre Rabhi sur l’éducation :

Pour une éducation à la beauté
et à la magie de la vie

(extraits)

Peut-on changer de société sans changer d’éducation ? Jamais cette question ne s’est posée d’une façon aussi cruciale et décisive qu’aujourd’hui. Cruciale parce qu’elle est sous-tendue par la souffrance de nombreux jeunes en désarroi face à un avenir sans visage. Décisive parce qu’une réponse erronée dans la complexité et les mutations rapides de notre époque aurait des conséquences quasi irrattrapables.

Nous sommes de ceux qui pensent que le changement de société ne peut être sans changement d’éducation, mais une éducation fondée sur la libération de l’être et l’instauration de l’enthousiasme de grandir et de connaître et non la peur de l’échec.

Nous voici à l’entrée du 3ème millénaire... Au plan mondial, une personne du Nord consomme autant que quatre personnes du Sud. Jamais l’humanité n’a vécu une telle crise de l’équité. Les inégalités mondiales, les famines, le suréquipement de guerre, la dégradation du support biologique sont autant de signes de nos échecs et nos régressions. Il semblerait même que nous arrivions à l’ultime question : l’humanité a-t-elle un avenir ?
Cependant rien, à notre avis, ne changera si les fondements de l’éducation ne changent pas. Entre les manuels scolaires d’histoire faisant implicitement l’apologie de la force à travers le catalogue de violence des champs de bataille, et un monde où l’avidité, les ambitions individuelles sont de règle, l’enfant entre en angoisse. On quitte le liquide amniotique pour plonger dans un monde "champ de bataille" où il faut se battre, gagner, être premier, dominateur, victorieux Il suffit d’observer ses propres enfants pour se rendre compte qu’ils évoluent bien plus sous la terreur de l’échec que l’enthousiasme d’apprendre.

Entre la pression qu’exerce sur lui l’ambition des parents et l’aiguillon de l’institution soucieuse de résultats statistiques, l’enfant se trouve prisonnier d’un monde tétanisé par la compétition et dont la finalité est de porter cette compétition au plan international pour le plus grand échec de l’humanisme planétaire.

L’agroécologie n’est évidemment pas la panacée, mais elle permet à l’enfant de recevoir les messages essentiels à travers les fondements de la vie. Un simple tas de compost peut faire l’objet d’une méditation active. Réunir les déchets de la matière organique morte, végétale et animale, les engager dans un processus de transformation pour développer des ferments microbiens et libérer des substances nutritives dans un premier temps ; nourrir ensuite cette terre avec l’humus obtenu et constater que cette terre restitue notre effort en nourriture et bien-être est une première leçon de réalisme en même temps que le retour raisonné à la relation nourricière initiale entre l’homme et la nature.

Cette initiation doit à notre avis s’appuyer forte-ment sur l’analyse scientifique, la compréhension des processus physiques et biologiques. Nos connaissances actuelles permettent cette lecture essentielle.
Par ailleurs, il n’est guère de scientifique lucide qui ne témoigne de l’indispensable alliance pour notre temps, de l’écologie et de l’humanisme. Lors-que cette voie d’investigation atteint ces limites et nous livre au mystère, celui-ci doit-il forcément nous angoisser ? N’avons-nous pas encore la dimension poétique, avec le délire de l’émerveillement face à la beauté infinie qui ne s’adresse plus à la raison mais à l’émotion ? “Que c’est beau !” s’exclamait sans autre commentaire le Ravi provençal. Une éducation sans éveil à la beauté est un handicap et une mutilation graves.
L’éducation à l’agroécologie doit absolument permettre de saisir clairement ce que signifie la légitimité de toute vie. Il faut prendre conscience de l’unité physique et biologique de la planète terre, une et indivisible en même temps que diverse, apprendre à la considérer au-delà de tous les nationalismes qui l’ont si misérablement fragmentée, morcelée, défigurée jusqu’au plus profond de nos consciences.

Un tas de compost, un arbre, un animal, un homme, une femme, un enfant, compris et respecté, une terre pressentie comme matrice active, subtile, mystérieuse et non une masse minérale inerte, peuvent ouvrir à l’enfant de nouveaux espaces de réflexion, à la vitalité qui, au-delà de nos agitations stériles, perpétue une volonté déterminée et tranquille, avec les saisons comme cadence, les floraisons comme jubilation, la fructification comme contre-poison au conditionnement militaire. Comprendre la cohésion et la cohérence de la biosphère doit lui permettre de retrouver sa juste place dans le grand fleuve du réel. Il est des gestes simples qui, mieux que toute théorie ou savoir encyclopédique, peuvent aider l’enfant d’homme à prendre la mesure de sa responsabilité et à assumer son rôle premier d’intendant attentif au message que le monde vivant dont il est membre tente de lui transmettre. Tout cela pourrait tempérer les effets d’un monde de brutalité mécanique, de pensée géométrique et de confusion des plans...

Nous souhaitons donc de toute notre raison et notre coeur une éducation qui ne se fonde pas sur l’angoisse de l’échec, mais l’enthousiasme d’apprendre. Une éducation qui révèle l’enfant à lui-même tout en lui révélant les richesses, l’énergie et la beauté qu’offre le monde à son alliance vitale et non à son avidité insatiable et destructrice. Une éducation qui abolisse le “chacun pour soi” pour exalter la puissance de la solidarité. Une éducation où le pouvoir de chacun soit au service de tous. Car demain ne pourra pas être sans la coalition des forces positives et constructives dont chacun de nous est le dépositaire.

Pour lire le texte complet, voir le site de Pierre Rabhi, Terre et Humanisme.