La justice française avait donné raison, en 2008, au journal, poursuivi pour "injure aux musulmans", estimant que les dessins visaient "clairement une faction", à savoir les terroristes, "et non l’ensemble de la communauté musulmane". [1]
Je trouve essentiel ce commentaire. Cette lecture au second degré devrait être accessible à tous. L’école apprend-elle cette lecture à tout le monde ? Une lecture en profondeur, en nuance, capable de prendre en compte le contexte avec le texte ?
On est au coeur du vivre ensemble : la pédagogie y est essentielle. Laisser les intelligence en friche a un côté criminel. La déshérence des intelligences, comme celle des familles, comme celle des quartiers, conduit à l’errance des coeurs. Les laissés pour compte que l’école laisse sur le carreau, des prêcheurs à l’esprit malade sont là pour les ramasser...
Iconoclastes, les caricaturistes de Charlie-Hebdo n’ont jamais, je pense, versé dans l’injure.
Ironie et dénonciation, certes, mais jamais l’injure.
Mais une remarque de Malek Chebel, parue dans la Libre, me fait réfléchir, et elle rejoint un commentaire entendu sur France 2 : on doit comprendre qu’il y a une autre façon de penser que la nôtre, une autre façon de lire aussi.
Certes, comprendre cela n’enlève pas un iota à la nécessité absolue de préserver la liberté d’expression. Il faut juste savoir aussi se mettre dans la peau - et dans la tête - de son interlocuteur.
"En islam, c’est le choix des musulmans, ils ne font pas cette séparation (entre le sacré et la liberté) pour le moment. C’est tout le problème que nous n’arrivons pas à comprendre d’ici parce que nous considérons que tout est profane, banalisé, déritualisé, que tout le monde est athée ou laïc. Ici on tient à pas mal de valeurs et on n’aime pas qu’elles soient bafouées. Là-bas, c’est pareil par rapport au sacré."
Je cite encore Malek Chebel (anthropologue des religions et philosophe, grand connaisseur de l’Islam et traducteur du Coran, http://fr.wikipedia.org/wiki/Malek_Chebel) dans un article de l’Huma du 9 janvier :
"Depuis de nombreuses années, avec quelques-uns, nous demandons aux musulmans de clarifier leur position par rapport au fondamentalisme religieux et à l’intégrisme de bandes de criminels très minoritaires en islam, qui sont d’ailleurs réprouvés par le Coran et la morale islamique. D’un autre côté, il faut faire attention à ne pas jouer avec l’émotion des gens. Il y a un milliard huit cents millions de musulmans qui se sentent insultés quand il y a des caricatures trop agressives. Pour un musulman, c’est choquant. Évidemment, en aucun cas la mort ne doit en être la conséquence. Il faut dialoguer. Les autorités françaises ne prennent pas suffisamment la mesure du danger de l’idéologie salafiste et intégriste. Ils veulent régler les problèmes par le biais de la sécurité alors qu’il faut prendre le taureau par les cornes. Il faut travailler en amont en mettant en place une plate-forme de réflexion et d’éducation, d’anticipation des crises et de détection des personnes qui passent à l’acte". (http://www.humanite.fr/malek-chebel-nous-sommes-dans-la-confusion-totale-sur-les-religions-562235)
Il parle d’éducation, là où je parlais de pédagogie. Je crois que ce sont deux facettes du même noyau.
Demain ne sera plus comme avant… Mais que tout cela ne ternisse pas nos souhaits pour l’année 2015, mais les raffermisse !
"Mais de quel prophète parlent-ils ? Celui des leurs sites Internet, de leur gourou ! Pas celui de l’amour ; de la tolérance, du pardon. Nous n’avons pas le même prophète ! Leur prophète est celui de la haine et de l’horreur ! Leur prophète n’est pas celui de l’islam, ni celui de l’islam de France."
HASSEN CHALGHOUMI l’imam de Drancy, également président de la conférence des imams de France, avait déjà soutenu "Charlie Hebdo". Il réagit ici à la phrase proférée par les tueurs : "Nous avons vengé le prophète".