1. La pandémie de civid-19 a-t-elle affecté les mouvements migratoires ?
La migration irrégulière ne s’est jamais arrêtée. Les gens sont retrouvés bloqués en route (vers l’UE). Un rapport d’Europol de mi-mai indique à ce titre que les trafiquants d’êtres humains se sont adaptés rapidement. Nous assistons à une diversification des opérations. De plus, les facteurs qui incitent les personnes à émigrer seront renforcés dans les prochains mois, en partie à cause des répercussions économiques de la pandémie dans le monde entier (selon le FMI, le produit intérieur brut va chuter de 5,4 % en Afrique subsaharienne en 2020, effaçant près de dix ans de progrès, NdlR). L’instabilité économique et le manque d’opportunités vont probablement déclencher une nouvelle vague d’immigration irrégulière vers l’UE. Un rapport du Bureau européen d’appui en matière d’asile parle aussi pour la première fois de réfugiés "Covid", cherchant un accès à des soins de santé.
2 La pandémie a-t-elle affecté la perception du phénomène migratoire ?
D’une part, l’idée d’accueillir des personnes extérieures dans nos communautés sera très difficile à envisager dans les prochains mois et années. D’autre part, nous aurons toujours une incitation économique à faire venir des travailleurs d’autres pays de l’UE. mais aussi de pays tiers. La démographie en Europe n’a pas changé, nous sommes toujours dans une situation où nous aurons besoin de beaucoup de travailleurs étrangers pour soutenir nos activités économiques.
3 Le débat sur la migration en Europe a-t-il dès lors évolué ?
Les décideurs politiques se sont concentrés à juste titre sur la lutte contre la pandémie, en essayant de faire face à son impact économique sur les États membres. Le thème de la migration a un peu chuté dans la liste des priorités politiques, ce qui a finalement laissé plus de temps à la Commission pour concocter le Pacte sur la migration. Du fait de la mise en place de restrictions aux frontières internes à l’UE, pour la première fois, nous avons connu une situation où les mouvements secondaires de demandeurs d’asile en Europe ont chuté drastiquement. C’était à la fois le rêve de nombreux décideurs politiques et une source de frustration.
Ces mouvements minent la confiance entre États membres, du fait que d’aucuns autorisent ces gens à voyager, alors que d’autres refusent de les accueillir. Pour la première fois, on a vu ce que cela signifierait d’avoir des frontières extérieures fermées, mais aussi des frontières intérieures à l’UE. Cela a donné l’illusion à certains gouvernements que c’est possible. Ce qui va probablement influencer la façon dont ils.envisagent la question migratoire.
Cette pandémie est utilisée par des gouvernements, déjà sceptiques sur la question migratoire comme une excuse pour étayer leurs idées. La situation est donc même devenue encore plus difficile pour trouver un accord.
La Libre, 8 juillet 2020