Chère Evelyne,
Je me permets de t’emprunter ce texte qui continue à tant me parler... et à me faire du bien, moi qui ai tant de mal à "déchiffrer" un texte écrit en écriture inclusive.
Et qui vois quels ravage cette mode pourrait avoir sur l’accès à la lecture de TOUS les enfants.
Tu sais combien, dans nos groupes d’Education nouvelle, nous sommes sensible à ces potentielles discriminations (qui se font en plus en catimini, sous l’alibi facile d’égalité !)
Michel Simonis
Bonne nouvelle récente : une alternative
Radio Canada (Publié le 22 mai 2020) : des solutions alternatives. Voir mon article "Épicène ? Vous avez dit épicène ?"
La cause profonde de toutes ces sottises, c’est l’ignorance où sont leurs auteurs des données élémentaires de ce qu’est une langue, et des analyses que mènent sur ce sujet, depuis Louis Ferdinand de Saussure jusqu’à aujourd’hui, les générations de linguistes du monde entier qui se sont succédé. Tels, les enfants en bas âge, ils en sont encore à croire que les mots ressemblent à ce qu’ils veulent dire, et que le fonctionnement grammatical et orthographique de ces derniers aurait à voir avec les réalités auxquelles ils renvoient.
Mais non, bien sûr !! Les mots ne renvoient pas au réel, mais à l’idée qu’en a celui qui les utilise : ils désignent, non les choses et les gens, mais leur "référent", c’est-à-dire, le concept qui les représente, et qui n’est jamais "ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre", comme dit le poète.
Entre le réel et la langue, il y a les sujets parlants. L’oubli de ce fait entraîne toutes sortes de contresens.
Il faut savoir, par exemple, que le genre n’a pas été créé pour traduire une différence de sexe : le genre, (comme le nombre du reste) n’est qu’un type de différence de FONCTIONNEMENT des mots, avec un déterminant différent, entraînant des accords spécifiques. La langue les utilise pour clarifier certaines différence de sens : le tour et la tour, le voile et la voile, (qui ne sont pourtant unis par aucun lien de mariage), et bien sûr, AUSSI des différences de sexe, parfois soutenues par une différence orthographique : un ami ; une amie. Mais là encore, c’est loin d’être une "règle" et surtout, c’est le référent qui est lié au mot, pas la chose !
Vous noterez au passage, que les organes sexuels ont des noms, de genre opposé à ce que leur sens laisserait attendre : les organes masculins ont des noms féminin, et les même organes féminins ont des noms masculins... Comme quoi !!
Que dire alors des mots féminins qui désignent des hommes : lorsqu’on affirme que le Président est UNE personnalité importante, met-on en doute sa virilité pour autant ? Et faudrait-il masculiniser la sentinelle qui monte la garde et l’ordonnance du Général ?
A propos de général, justement, le féminin existe, mais avec un sens très précis, celui de "épouse du général". Ce n’est en rien le titre d’une femme qui a obtenu les galons correspondants. Les mots n’ont pas attendu les inventeurs de l’écriture inclusive pour exister, et avoir un sens... Or, ils résistent aux modifications imposées.
Il est temps de rappeler la base de ce débat absurde : la notion d’arbitraire du signe linguistique, et les apports de Louis Ferdinand de Saussure.
Même si les générations de linguistes, qui ont suivi ce dernier, l’ont amendée, contestée, peaufinée, précisée, cette notion reste une condition absolue de la communication. La logique des sujets parlants étant infiniment variable et diverse, aucun signe défini logiquement, ne permettrait de communiquer : il doit être à la fois extérieur à toute logique, et objet d’une convention nécessaire. Bien avant Saussure, Pascal l’affirmait déjà dans ses Pensées.
Entre deux personnes, il est certes possible de modifier les règles du jeu ; dans un petit groupe aussi. C’est pourquoi, tant que l’écriture a été le fait d’un petit nombre de privilégiés, elle a pu être modifiée ou bloquée par des initiatives privées, comme celles de Robert Estienne ou Malherbe ; mais quand il devient "de masse" un système de communication a absolument besoin de stabilité.
Les seules modifications possibles sont celles de l’évolution normale et naturelle de toute chose vivante, elle-même régulée par un Maître, tout puissant, l’Usage social, qui gère tout et seul, y compris les "modes" qui se succèdent, les argots, les inventions verbales, lesquelles en constituent la partie turbulente et vivante, restant toujours peu ou prou sous son autorité, très loin des initiatives privées.
Pas plus qu’on ne peut décider de modifier la prononciation d’une langue, qui en est l’image sonore (elle se modifie toute seule avec l’Usage), on ne peut, en dehors de ce que l’évolution NORMALE provoque, sous l’influence d’événements, gérés, eux aussi, par l’Usage, modifier, de manière privée, l’écriture des mots... Elle en est l’image visuelle, en quelque sorte, le visage.
Tout ceci relève bien d’un embrouillamini d’ignorances et de prétentions infantiles, qui, sans avoir jamais lu une ligne de linguistique, se déclarent compétentes pour légiférer en matière de langue écrite, oubliant que celle-ci n’est régie que par cet unique maître, l’Usage, sur lequel toute initiative privée se casse les dents inévitablement.
Et puis, avouez que les droits de la femme méritent autre chose, comme défense, que ces enfantillages…
Dans les commentaires, cette information :
Le manuel d’utilisation de l’écriture inclusive a été créé et mis à disposition gratuitement (merci !) par l’agence Mots-clés. Il serait légitime de penser que les initiateurs de cette pseudo réforme soient des linguistes confirmés œuvrant pour une réforme de l’orthographe. Pas du tout ! Cette agence Mots-Clés est une agence de communication d’influence fondée en 2011 par Raphaël Haddad. Il est titulaire d’un Master de conseil en stratégie et docteur en Sciences de l’information et communication, il est aussi chroniqueur à France Culture et est au comité de rédaction de la revue La Règle du Jeu fondée par Bernard Henri Levy. Cette agence est dirigée par deux autres directeurs associés et une cheffe de projet, Chloé Sebagh. Elle est spécialiste des stratégies discursives de légitimation du concept d’islamophobie et pilote, pour l’agence, les missions relatives à l’écriture inclusive. Mots-Clés vend ses services aux sociétés qui souhaitent développer leur stratégie de communication et d’influence.
Une agence d’influence est-elle légitime pour imposer une réforme de l’orthographe ? Pourquoi pas. Mais le plus intrigant n’est pas là. Explorons le site internet de Mots-Clés. (1)
Florilège des phrases les plus remarquables :
– On ne fait pas de révolution sans changer de vocabulaire.
– Nous croyons une chose simple : le discours n’est pas simplement un instrument de l’influence, c’est le lieu de l’influence.
– Le chemin d’influence ne permet pas une amélioration incrémentale de votre influence, mais un bond véritable, en soutien de votre développement commercial.
– Nous croyons une chose simple : le discours n’est pas simplement un instrument de l’influence, c’est le lieu de l’influence. En ce sens, c’est en travaillant sur la stabilisation et l’essaimage de ses mots, ses formulations, ses narratifs, qu’une organisation parvient à conquérir ou conserver une position d’autorité.
– Que c’est par la capacité à imposer ses mots, ses formulations et ses narratifs, qu’une organisation exerce pleinement son influence.
Georges Orwell a des leçons à prendre !
Et si, cette pseudo réforme de l’orthographe qu’est l’écriture inclusive n’était autre qu’une magnifique opération de marketing, une remarquable opération de communication-promotion. À peu de frais. Avec la caution de l’égalité homme-femme, qui peut-être contre ? Pendant plusieurs semaines tous les médias ont vanté les mérites de cette nouvelle forme d’écrit. Nos académiciens ont eu des crises d’urticaire. Nos ministres Françoise Nyssen et Jean Michel Blanquer ont cru bon de donner leur avis.
Le carnet de commandes de l’agence Mots-Clés a dû s’étoffer !
Chapeau bas à l’équipe de direction !
32. Le mercredi 6 décembre 2017 à 20:47, par Dominique Frochot
Juste comme ça, en passant :
A propos de "cesser d’invisibiliser les femmes", si on y regarde de plus près, le masculin l’emporte toujours sur le féminin, dans l’écriture inclusive... Le mot de départ est au masculin et le féminin se contente de la portion congrue : un "e" par ci (souvent coincé entre son point médian et celui du pluriel), un "trice" par là. Comme visibilisation (si, si, au point où en est, ça doit pouvoir s’écrire), les ayatollahs féministes auraient pu rêver plus grand..
Dominique·e
25. Le jeudi 23 novembre 2017 à 15:10, par Dominique Grandpierre
Pour nourrir notre réflexion, puisque, après tout, c’était le sujet de la chronique d’Eveline.
Jean Pruvost - Directeur éditorial des Éditions Honoré Champion - professeur des universités émérite en lexicologie et lexicographie, fait une lecture critique du Manuel d’écriture inclusive de Raphaël Haddad, édité par l’Agence Mots-clés.
Le Manuel d’écriture inclusive – 18 pages –, relayé notamment par une récente pétition en faveur de l’« écriture inclusive » et 374 enseignants, a nourri une large polémique. Retour sur ce qui alimente le débat.
On ne peut manquer d’être surpris lorsqu’on découvre que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen pourrait être remise en cause dans sa formulation pour se voir substituer une autre graphie et un autre choix lexical : la « Déclaration des droits humains et du·de la citoyen·ne ». Comment, d’ailleurs, nommer cette ponctuation ? « Point médian » ou « point milieu », ou encore « point d’altérité » ? Ajoutons la « grammaire égalitaire », la « double flexion », le « langage épicène ». Autant de formules en rien transparentes.
Le sous-titre de ce livret, « Faites progresser l’égalité femmes · hommes par votre manière d’écrire », est d’emblée troublant. Le casse-tête orthographique commence. Ce « point médian » doit-il être précédé et suivi d’une espace, comme dans ce sous-titre ? À moins que ce ne soit la première « faute » de l’écriture inclusive puisque, tout au long du manuel, l’espace n’est pas de mise. Il est vrai que sa norme, le fixant à mi-hauteur des lettres minuscules, n’est pas d’un usage commode.
Ce « point » au nom encore mal fixé a pour origine un constat relevé en 1718 dans la deuxième édition du Dictionnaire de l’Académie, ainsi formulé : « La grammaire divise les noms en trois genres, le masculin, le féminin et le neutre. La Langue Françoise n’a point de genre neutre. » Ce « neutre » a donc obligé l’usage à se ranger du côté du masculin ou du féminin. Il eût été inconvenant de déclarer le féminin « neutre ». L’usage a donc choisi le masculin. On oublie toujours que l’Académie française ne légifère pas. C’est tout simplement l’usage « que l’Académie s’attache depuis trois siècles à consigner dans son Dictionnaire », rappelle Hélène Carrère d’Encausse.
Pour l’heure, en suivant Raphaël Haddad dans son livret, « tou·te·s les citoyen·ne·s, écolier·ère·s ou acteur·rice·s de la chose écrite » n’ont pas adopté cette « écriture inclusive » et très peu « nombreux·euses » sont, sur les soixante millions de Français et de Françaises, « ceux·elles » qui la souhaitent. Pourquoi ?
Rappelons d’abord la règle du tiers : notre langue très analytique implique que tout texte anglais traduit en français soit plus long d’un tiers. Les éditeurs le savent et le chiffrent. Avec l’écriture inclusive, la note deviendrait astronomique. Ensuite, spontanément, la langue va toujours à l’économie : « les professeurs sérieux » s’écrit plus vite que « les professeur·e·s sérieux·euses ». Tout comme on dira « les chats » plus brièvement que « les chattes et les chats ».
Une dernière remarque est à formuler : faute de « neutre masculin », ce « il·elle·s » est somme toute assez discourtois. Dans l’incontournable discrimination qu’impose l’espace linéaire, « elle » ou « il » ne peuvent être écrits en même temps, à moins de les installer « l’un·e » sur l’autre, avec un nouveau débat : qui aura la place haute ?
Les mots épicènes, identiques au masculin et au féminin – guitariste, linguiste, etc. –, sont aussi concernés. Exemple : « quel·le·s bon·ne·s linguistes ! », formulation objectivement illisible et imprononçable. Ici aussi, sur l’espace linéaire, c’est encore le masculin qui l’emporte. Le neutre masculin est de fait plus courtois. On comprend vite pourquoi l’usage n’est pas prêt à intégrer pareille complexité, de fait discriminante.
Quant à la « double flexion », elle est déjà inscrite dans l’usage avec « Françaises, Français », « Citoyennes, citoyens », et il suffit d’écouter Dominique Bona pour percevoir que l’Académie française, s’agissant des noms de métier, intègre déjà progressivement cet usage.
En définitive, ce débat aura été utile et vivifiant : il ravive la réflexion sur notre langue en nous permettant de rappeler que, fondé sur l’usage de millions de personnes, le fleuve de la langue coule avec suffisamment de puissance pour ne pas intégrer ce qui nuirait à son cours. Son seul maître reste l’usage large au sein de la francophonie. Un ministre vient de le souligner.
Jean Pruvost – journal la Croix
NOTE
(1) Le site internet de Mots-Clés.
Fondée en 2011 par Raphaël Haddad, l’agence Mots-Clés a un credo simple : le discours n’est pas un instrument de l’influence, c’est le lieu de l’influence.
En conséquence, c’est en parvenant à imposer ses termes, ses formulations, sa syntaxe, ses narratifs qu’une organisation acquiert ou entretient sa position d’autorité.
Cette approche, Mots-Clés la met en oeuvre concrètement à partir d’une méthodologie propriétaire : le chemin de l’influence.
Pour en savoir davantage : www.motscles.net
Mots-Clés a édité un manuel d’écriture inclusive, disponible en téléchargement libre ; s’appuyant sur d’importants travaux précédents, et en particulier sur ceux du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes,le manuel a été l’occasion de formaliser trois conventions simples et de proposer l’introduction dans la langue française d’un nouveau signe de ponctuation : le point milieu.
L’agence a développé une offre complète d’accompagnement vers l’écriture inclusive : ateliers d’initiation à l’écriture inclusive, rédaction ou reprise de contenus éditoriaux en écriture inclusive (rapports d’entreprise, site Internet, newsletter), rédaction de lexiques dédiés ou édition de manuels d’écriture inclusive adaptés à votre entreprise.
MANUEL D’ÉCRITURE INCLUSIVE - static1.squarespace.com
Manuel d’écriture inclusive - Édité par l’agence de communication d’influence Mots-Clés - 5 - D’autres nous ont précédé·e·s dans cette
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Qui sommes-nous ?
« Le discours n’est pas simplement ce qui traduit les luttes ou les systèmes de domination, mais ce pour quoi, ce par quoi on lutte, le pouvoir dont on cherche à s’emparer » : reprenant à notre tour cette idée formulée par Michel Foucault dans L’ordre du discours, nous considérons au sein de l’agence de communication d’influence Mots-Clés que le discours n’est pas simplement un instrument de l’influence, mais bien le lieu de l’influence. Que c’est par la capacité à imposer ses mots, ses formulations et ses narratifs, qu’une organisation exerce pleinement son influence.
Ce travail, nous le menons pour nombre de nos client·e·s dans le cadre d’accompagnements en Design narratif®, essaimage et attribution de formulations originales, entretenant ainsi leur position d’autorité dans leur environnement. Parmi les expressions lancées par Mots-Clés ces dernières années et désormais installées dans le vocabulaire ordinaire ou professionnel de l’écosystème de nos client·e·s : « bien manger », « excellence opérationnelle », « Big Data responsable », « performance contextuelle », « smart Professional network ».
Cette autorité discursive n’est pas accessoire : dans des sociétés de plus en plus servicielles et digitalisées, il n’existe plus de leadership commercial sans leadership culturel. Par son approche unique, les efforts d’influence déployés par Mots-Clés viennent ainsi au service direct du développement économique de ses client·e·s.
Bonne nouvelle : une alternative se développe à Montréal : un mode de communication “épicène” au lieu de l’écriture dite inclusive.
VOIR l’article : Epicène ? Vous avez dit épicène ?
Montréal veut s’attaquer « à la suprématie » du masculin sur le féminin en français