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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
Slogan du site

"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Edito du n° 54, déc. 2004
Article mis en ligne le 11 octobre 2008
dernière modification le 29 avril 2014

édito

Chine, 1976 : 255.000 morts dans un séisme de magnitude 7,5. Deux cent mille morts en Chine encore en 1920 et en 1927. Si on n’en est pas là aujourd’hui, dix pays et plusieurs millions de sans abris, donnent à cette catastrophe une amplitude jamais égalée. Certes, la terre a bougé sur son axe... Mais ce qui change aujourd’hui, outre la Télé et Internet diffusés partout, c’est la présence de touristes occidentaux sur les lieux. La solidarité qui s’organise, sans précédent dit-on, est-elle due en partie à cette présence, qui nous rapproche de ce qui s’est passé là-bas.

Un message reçu de l’Inde au moment de boucler ce numéro de l’Arc en ciel vient corroborer ces réflexions. L’Inde a voulu se débrouiller seule, mais elle ne s’est pas sortie du système des castes qui entraîne des discriminations dans l’aide. Tabler sur l’aide internationale, dit notre ami Brutus, c’est aussi offrir le flanc à ces luttes "des politiciens, des sectes et des ONG" pour occuper le terrain... Mis à part les touristes disparus et leurs proches, ce sont les plus pauvres qui ont subi les conséquences les plus dramatiques. Le sous-développement nous saute à la gorge. Dira-t-on enfin : "trop, c’est trop !" ?

Rachel Crivellaro, dans un édito LLB du 29-12-04 ne mâche pas ses mots. Elle écrit :

"Bref, comme pour de très nombreuses catastrophes naturelles, tous les ingrédients sont réunis pour montrer du doigt la fracture Nord-Sud. Avec, d’un côté, les riches qui peuvent s’offrir un dispositif préventif, et de l’autre les parias de la Terre condamnés à être décimés par le déchaînement des éléments naturels. Conséquence inéluctable de la pauvreté, du sous-développement et du cynisme.

(...) La mort de touristes occidentaux dans ce drame spectaculaire - au sens morbide du terme - nous rappelle aussi brutalement que si nous avons voulu un monde sans frontière, il n’y a aucune raison pour que ses maux ne nous reviennent pas un jour en pleine figure. En ces temps où la planète ne recèle plus de terra incognita, où passer Noël sous les Tropiques n’est qu’un des avatars parmi les plus banals de la mondialisation touristique, peut-on encore être indifférents aux guerres larvées, sourds aux génocides silencieux, aveugles devant une pauvreté endémique, complaisants avec des inégalités criantes ? Tous ces ferments de la misère et du chaos qui rendent encore plus vulnérables les populations les plus fragiles. Bien sûr, les catastrophes naturelles obéissent à des lois impérieuses et l’on peut difficilement désigner des coupables. Mais, aujourd’hui, l’on peut au moins amortir le choc des tsunamis. L’égoisme reste, lui, une irrésistible lame de fond."

Je ne peux m’empêcher de faire des parallèles entre des évènements qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre : après les attentats du 11 septembre à New-York, on a dit que plus rien ne serait comme avant. L’envie me prend qu’on puisse dire aussi qu’à partir du 26 décembre 2004 au matin, plus rien ne sera comme avant. Parce qu’un véritable changement aura pris place dans le monde, mais ni pour les mêmes raisons ni pour les mêmes perspectives d’avenir. Il s’agit ici d’un changement à l’égard de la pauvreté, de l’injustice et du sous-développement.

Je fais des parallèles, et je vous invite à faire des liens.

Ce numéro de l’Arc en ciel était bien avancé au moment où est arrivé le Tsunami. Mais vous trouverez au fil des pages un certain nombre de choses qui s’y relient.

Faire des liens, et envisager toutes choses comme reliées, c’est une démarche typiquement orientale, et féconde.

Comment amener pour le plus grand nombre d’entre nous la perception du sous-développement comme étant intrinsèquement lié à notre développement, et à notre mode de vie ?

Comment faire pour que partout sur la planète, les gens, vous et moi, mais aussi les responsables politiques, économiques et culturels soient conscients de cela. Pas seulement une prise de conscience, mais une vraie "conscientisation", qui change les perceptions, les attitudes et les actes. Je vous invite donc à lire ce numéro entre les lignes.

Il y a bien sûr des liens directs à faire, par exemple avec le formidable boulot de Wangari Maathai au Kénya, prix Nobel de la Paix 2004 : planter des arbres au lien de détruire les mangroves pour faire place au tourisme... Mais il y a aussi d’autres lectures entre les lignes à faire.

Ce numéro est lourd de pages sur l’enseignement. Depuis la rentrée de septembre, beaucoup d’effervescence agite les partenaires de l’éducation. C’est qu’en France, le gouvernement et le ministre Fillon lance de (nouveaux ?) grands projets de rénovation : séduisants, remplis de bonnes intentions... À voir ce qu’elles vont changer réellement sur le terrain, et leurs effets pervers. Philippe Meirieu nous en parle. Chez nous, un nouveau gouvernement, vite entré dans l’arène (vilain jeu de mot, je le concède !), se coltine à la fois avec des projets audacieux et qui font peur, parfois issus de la législature précédente, et les résultats (désolants ou révoltants, c’est selon) de PISA.

Les lecteurs qui ne sont pas directement concernés par l’école, pourront y voir matière à des réflexions qui dépassent l’enseignement : l’école en remue ménage pose des questions qui concernent tout le monde et la société toute entière. Encore des liens à faire, en lisant entre les lignes... Il y aurait matière à un apprentissage de la stratégie : "comment lit-on entre les lignes ?" [1]

Donc si tout est lié, l’école, la sélection intelligente des plantes, sans recourir à la transgénèse (OGM), l’éco-consommation, le comment l’adolescent vit son corps, l’histoire de Martin Brun, la question du voile dit "islamique", l’éolienne des enfants, les vols de nuit, le commerce éthique, la mer d’Aral, les paradoxes au Pakistan, les femmes à Kandahar, les livres "ami des bois"... et tous ces sujets que vous allez trouver dans ce numéro [2], comment les voyez-vous reliés avec la question Nord-Sud ? avec la balance sur-développement/sous-développement ?

Un numéro que vous trouverez sans doute bien sérieux, mais je n’avais pas trop le coeur à y donner beaucoup de place à l’humour... Je vous en souhaite néanmoins bonne lecture. Non sans vous rappeler que si vous voulez continuer à recevoir l’Arc en ciel, il convient de vous réabonner très vite.

Avec mes voeux à chacun pour une très bonne année 2005, une année de rencontres et de découvertes, riche en fantaisie, en poésie et en contemplation.

Michel Simonis


"C’est la plus grande surprise de ma vie.. Lorsque nous plantons de nouveaux arbres, nous plantons les graines de la paix.."

wangari Maathai,
prix Nobel de la paix 2004