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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
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"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Un article paru dans le dernier numéro d’IMAGINE - 68, juill.-août 2008
Moins de pétrole contre plus de biodiversité
Article mis en ligne le 20 juillet 2008
dernière modification le 5 août 2009

Alors que le prix du pétrole flambe, le gouvernement équatorien propose de renoncer, contre compensation financière, à l’exploitation d’un important gisement pétrolier situé au creur de l’Amazonie. Drôle d’idée ? Pas si sûr.

Comment mieux prendre la conjoncture à rebrousse-poil ? L’Equateur, petit pays endetté d’Amérique latine, envisage de renoncer à l’exploitation d’un gisement de pétrole prometteur, situé dans le parc naturel de Yasuni. Le président équatorien, Rafael Correa, qui a avancé cette proposition en septembre dernier devant l’Assemblée générale des Nations unies, prend pourtant très au sérieux l’extraction pétrolière, dont dépendent 40 % des exportations de son pays. Mais face au gisement du parc Yasuni, il a décidé de marquer le pas.

Fierté nationale

« Il était temps de réagir, tranche Hector Santos, acteur social et écologiste équatorien, partenaire de l’ONG belge Quinoa. L’impact environnemental de l’exploitation pétrolière est loin d’être négligeable. Or, le pays perd déjà 74 000 hectares de forêts par an et nous pratiquons une agriculture vorace en engrais et pesticides qui polluent les rivières. Il faut mettre de l’ordre dans ce que nous faisons. » Beaucoup d’Equatoriens gardent en mémoire la désolation qui s’est abattue sur la région de Lago Agrio, dans l’Est amazonien, après son exploitation anarchique par la compagnie pétrolière américaine Texaco. La compagnie extrayait un pétrole chargé d’eau goudronneuse qui était simplement séparée de l’or noir sur place et abandonnée dans des centaines de bassins à ciel ouvert. Avec le temps et les pluies, les bassins ont inévitablement débordé, empoisonnant sols, rivières et nappes phréatiques. Selon les experts, une marée noire équivalant à 30 Exxon Valdez s’est déversée au coeur de la région, aujourd’hui rendue invivable pour des décennies. « Demain ce sera au tour du parc Yasuni, renchérit Ciro Cazar, compagnon d’Hector. Or, on parle ici de la fierté nationale : la plus grande forêt tropicale classée par l’Unesco, qui protège la plus importante biodiversité du monde, avec plus de 1 000 variétés d’arbres et 600 de poissons. »

Habitant de la planète

A l’université Simon Bolivar de Quito, l’économiste équatorien Carlos Larrea a sorti sa calculette. Selon lui, le gisement de Yasuni devrait produire 846 millions de barils en 13 ans et rapporter à l’Etat 5,7 milliards de dollars. En même temps, l’exploitation engendrera un coût environnemental de 1,25 milliard de dollars, suite aux pertes résultant de la baisse de l’exploitation forestière, de la chute de la biodiversité, de la diminution de fréquentation du tourisme. A l’arrivée, le bénéfice ne sera plus que de 4,5 milliards de dollars. En conséquence, il soutient l’engagement de l’Equateur de ne jamais exploiter ce pétrole, si la communauté internationale crée un fonds de compensation alimenté par une rente annuelle de 350 millions de dollars. Le fonds dédommagera le pays d’un important manque à gagner, alors qu’il doit affronter une dette extérieure de 13 milliards de dollars et combattre la pauvreté qui touche 60 % de sa population.

Qui peut participer au fonds ? Tout le monde : particuliers (vous et moi), ONG et surtout gouvernements. Pour l’instant, cette curieuse initiative n’a pas reçu beaucoup de réponses, si ce n’est quelques encouragements venus d’Espagne, d’Italie, de Belgique, d’Allemagne et de Norvège. « Il y a un intérêt mondial, mais pas encore de proposition concrète », précise, laconique, Juana Ramos, la responsable financière de l’opération.
Or la proposition équatorienne arrivait à échéance le 5 juin dernier. Au pays, les politiques et les intellectuels qui avaient soutenu l’initiative ne cachent pas leur déception. « Il y a plus de variétés d’arbres sur un hectare du parc du Yasuni que sur tout le territoire des Etats-Unis, s’est insurgé dans la presse nationale le président du Parlement, Jorge Cevallos. Il serait lamentable qu’il n y ait pas de réponse de la part des habitants de la planète."

Pressé de rebondir après cet échec le gouvernement équatorien a peaufiné son montage financier et prolongé sa proposition jusqu’au 4 octobre prochain. L’Equateur émettra, à l’intention des généreux bailleurs, des « bons de responsabilité » qui garantiront l’intégrité du parc. Si, à un moment, le gouvernement, ou ses successeurs, devait revenir sur ses engagements et exploiter quand même le Yasuni, ces bons se transformeraient en dettes extérieures permettant aux bailleurs de réclamer le remboursement de leurs capitaux.

Reste à convaincre les donateurs. Et vite. Petroecuador, la compagnie nationale des hydrocarbures, qui joue sa propre partition, a déjà lancé le processus d’attribution des zones pétrolières du parc. Le 4 octobre, c’est presque demain.

Jean-François pollet
Imagine n° 68, juillet-août 2008

Le projet présenté par le Président de l’Equateur

Pour préserver l’exceptionnelle biodiversité du Parc Yasuni, le président de la République de l’Equateur, l’économiste Rafael Correa, renonce aux ressources pétrolière que ce parc renferme.
Comment présente-t-il son projet aux Nations Unies ?
Lire des extraits de son discours devant l’assemblée générale en 2007.