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LARCENCIEL - site de Michel Simonis
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"To do hay qui ver con todo" (tout a à voir avec tout) Parole amérindienne.
Comprendre le présent et penser l’avenir. Cerner les différentes dimensions de l’écologie, au coeur des grandes questions qui vont changer notre vie. Donner des clés d’analyse d’une crise à la fois environnementale, sociale, économique et spirituelle, Débusquer des pistes d’avenir, des Traces du futur, pour un monde à réinventer. Et aussi L’Education nouvelle, parce que Penser pour demain commence à l’école et présenter le Mandala comme outil de recentrage, de créativité et de croissance, car c’est aussi un fondement pour un monde multi-culturel et solidaire.

Michel Simonis

Le rêve d’un Web universel, ouvert et libre a-t-il disparu ?
Article mis en ligne le 9 octobre 2017
dernière modification le 4 décembre 2022

" Le rêve d’un Web universel, ouvert et libre a presque disparu aujourd’hui. Peu à peu, ce qui était une belle promesse s’est transformé en un cauchemar orwellien. Tout ce que nous faisons en ligne est non seulement stocké quelque part, mais dûment analysé. "

Il me paraît nécessaire de réinventer le Web. Il faut notamment redonner du pouvoir à l’usager, et lui redonner le contrôle de ses données personnelles. Il faut proposer des alternatives plus ouvertes et plus libres aux services commerciaux d’aujourd’hui et il faut sortir d’un modèle purement publicitaire qui ne pourra être que de plus en plus aliénant.

Cyril Fievet, journaliste et auteur spécialisé dans les nouvelles technologies.

Tim Berners-Lee, l’inventeur du World Wide Web, constatait l’année passée que le Web était "cassé". Partagez-vous ce constat ?

Je suis globalement d’accord, même si la formule est volontairement provocatrice (et un peu réductrice). Le rêve d’un Web universel, ouvert et libre a presque disparu aujourd’hui. Peu à peu, ce qui était une belle promesse s’est transformé en un cauchemar orwellien. Cela tient à deux choses. D’un côté, quatre ou cinq entreprises maîtrisent l’immense majorité des communications, des contenus et des données. Internet et le Web, décentralisés par construction, se sont "dé-décentralisés" : les modèles hiérarchiques et pyramidaux ont repris le dessus. De l’autre côté, les utilisateurs se sont engouffrés dans des services objectivement bien faits, pratiques et utiles, sacrifiant au passage une partie de leur vie privée et de leur liberté individuelle. Si le Web est cassé, ou en tout cas très abîmé, c’est nous, les internautes, qui en sommes responsables.

Comment cela ?

A mon sens, la figure emblématique de cette triste évolution est Facebook. Pour beaucoup de gens, hélas, "aller sur le Web" veut simplement dire aujourd’hui aller sur Facebook, qui n’est pourtant qu’un seul site Web, purement commercial. On voit des entreprises ne plus créer de sites Web présentant leur projet ou leurs produits, mais simplement une page Facebook. Et l’adresse de cette page figure même sur la documentation commerciale de l’entreprise, ce qui revient, de façon absurde, à faire la publicité d’une entreprise tierce plutôt que la sienne. Au lieu d’ouvrir un blog, site personnel servant d’espace de liberté où chacun peut s’exprimer à sa guise, on publie et partage sur Facebook, un site largement censuré, bourré de publicités, et où tout ce qui s’affiche est savamment manipulé. Même quelques grands médias publient leurs articles sur Facebook, lui abandonnant la monétisation de leurs contenus. Cela me paraît sidérant. Et ces contenus de qualité s’y retrouvent mêlés, à parts égales, à des contenus effarants : "fake news", contre-vérités scientifiques, "clickbaits", etc. Ce faisant, l’usager a totalement perdu la propriété de ses données. Et tout ce que nous faisons en ligne, le moindre message envoyé, la moindre photo partagée, le moindre clic, est non seulement stocké quelque part, mais dûment analysé, par des outils de plus en plus sophistiqués, qui servent à réaliser de véritables portraits-robots de notre personnalité, nos actions, goûts, habitudes… En 2015, une étude universitaire a montré que Facebook peut cerner votre personnalité plus précisément que les personnes les plus proches de vous (collègues, amis ou famille). Inquiétant, n’est-ce pas ?

Faut-il dès lors réinventer le Web ?

Oui, ça me paraît nécessaire de réinventer le Web. Il faut notamment redonner du pouvoir à l’usager, et lui redonner le contrôle de ses données personnelles. Il faut proposer des alternatives plus ouvertes et plus libres aux services commerciaux d’aujourd’hui (qu’il s’agisse de Facebook, Dropbox ou YouTube). Et il faut sortir d’un modèle purement publicitaire qui ne pourra être que de plus en plus aliénant.

N’est-ce pas une liste de vœux pieux ?

Non, le mouvement est en marche, porté par plusieurs projets ambitieux et rendu possible par des briques technologiques qui manquaient jusqu’alors. IPFS, Zeronet, Blockstack ou d’autres démontrent déjà la faisabilité et la réalité d’un Web purement décentralisé, parfois même sans serveurs, où l’internaute peut choisir d’être anonyme ou en tout cas cesser d’être constamment traqué. (...)

Lire tout le texte : La Libre du 26 avril 2017